[MUSIQUE]. Nous avons vu qu'une carte résulte toujours d'une succession de choix effectués à toutes les étapes de sa conception et de sa réalisation. Le choix du fond de carte est un point essentiel de la construction de la carte. Un fond de carte comprend l'ensemble des éléments géographiques nécessaires à l'identification de l'espace présenté par la carte, il est toujours lié à l'échelle et au sujet traité, ainsi qu'au public auquel s'adresse la carte. Naguère, le fond de carte était cherché et sélectionné en consultant des documents papier de référence : atlas, cartes produites par des organismes spécialisés. Aujourd'hui il est recherché sur Internet. Les ressources en ligne sont abondantes. Pour arrêter son choix il est donc indispensable de vérifier l'origine du fond de carte, de comparer plusieurs sources, d'apprécier la fiabilité et la qualité du document. Vous téléchargerez la fiche Trouver des cartes et des fonds de cartes qui liste quelques sites proposant de bonnes références. Vous pouvez choisir des fonds vectoriels à télécharger en formats AI, EPS, SVG, que vous utiliserez directement en sélectionnant les éléments dont vous avez besoin. Si aucun fond vectoriel ne convient parce que le niveau de généralisation est insuffisant, parce qu'il n'y a pas certains éléments de repaire etc., vous pouvez choisir de dessiner, c'est-à -dire de numériser vous-mêmes le fond de carte en vous appuyant sur des fonds raster en formats JPEG, TIF, PDF. Lors du choix du fond de carte et de sa numérisation, quatre points essentiels sont à considérer : la projection cartographique à choisir en fonction de l'espace à cartographier, le placement de cet espace dans un cadrage, les éléments qui doivent y figurer, maillage territorial, hydrographie, villes etc., et enfin le niveau de généralisation adapté à la carte. La généralisation est une opération difficile, qui nécessite des connaissances géographiques et une longue pratique. Premier point : trouver une projection adaptée. Pourquoi se préoccuper des projections cartographiques pour réaliser de simples cartes thématiques? Pour avoir une idée du type d'altération qui résulte de la mise à -plat d'une surface sphérique pour choisir la projection la mieux adaptée à la région à cartographier, pour comprendre que deux cartes qui ne sont pas élaborées dans le système de projection ne peuvent pas se superposer ni se raccorder, une difficulté qui est souvent rencontrée. Nous avons déjà dit un mot sur les projections dans la première leçon. Le choix de la projection est primordial dans la construction du fond de carte. Du point de vue des altérations, on divise en trois catégories les types de projection. Celles qui conservent les angles, donc les formes, mais dans lesquelles les distances et les surfaces augmentent au fur et à mesure que l'on s'éloigne du point central de la projection. Ces projections sont dites conformes. À l'inverse, celles qui concernent la proportionalité des surfaces mais altèrent les formes sont dites équivalentes. Enfin, celles qui tentent de compenser au mieux ces deux types de déformations sont dites aphylactiques ou quelconques. La projection de Mercator est la plus connue des projections conformes. Elle a été créée au XVIe siècle pour les besoins de la navigation. Aujourd'hui elle a envahi les écrans d'ordinateurs car c'est la projection retenue par Google Maps, ce qui peut être gênant car les déformations de surfaces y sont considérables, comme le montre la superposition de Mercator et d'une projection respectant les surfaces. Il n'est pas souhaitable d'utiliser cette projection en cartographie thématique. Ce sont les projections équivalentes, qui maintiennent les rapports de surfaces entre les pays, qui doivent être retenues pour les cartes statistiques à l'échelle du monde. L'une d'elle, la projection de Peters, a connu un grand succès dans les années 70 et 80, en donnant aux pays du sud leur importance réelle. Sans devenir spécialiste des projections, tout cartographe doit avoir en tête que le système de projection commande la forme du fond de carte et donc la perception de l'espace cartographié. Bien sûr, plus l'espace cartographié est large, plus sa représentation est sensible au système de projection. Seuls les plans et les cartes à grandes échelles ne sont pas déformés de façon significative. Le choix de la projection n'est pas anodin. Il applique une manière de regarder et de montrer l'espace géographique avant même d'y présenter les données. Le fond de carte comporte l'ensemble des repères nécessaires et suffisants à l'identification de l'espace à cartographier, à la présentation du territoire auquel s'applique l'information thématique. Lors de la recherche du fond de carte, vous veillerez bien évidemment à trouver sur un même fond ou sur des fonds compatibles, c'est-à -dire qui se superposent parfaitement, tous les éléments dont vous avez besoin : traits de côtes, hydrographie avec le niveau de précision requis, frontières, maillages administratifs souhaités, en vérifiant qu'ils sont bien actualisés, points des villes etc. Ce fond de carte de référence doit bien sûr comporter une échelle graphique que vous n'omettrez pas de relever lors de la numérisation. Attention à choisir une image de bonne qualité technique qui ne deviendra pas floue lorsque vous aurez besoin de zoomer pour la numérisation. Une fois le fond de carte retenu, le cadrage est l'étape suivante. Parfois, vous déciderez librement du format de la carte, parfois il vous sera imposé par une mise en page. L'espace cartographié, par exemple un pays, est bien évidemment placé au centre du cadrage. Si le fond de carte porte un carroyage géographique, les méridiens et les parallèles, le méridien central pour l'espace cartographié est vertical, les parallèles coupent les côtés droit et gauche du cadre, à la même hauteur. Pour réaliser correctement ce placement, il faudra parfois faire subir une rotation au document d'origine avant la numérisation. Il ne faut pas arrêter le fond de carte juste au bord du cadrage mais prévoir une petite marge, un débordement tout autour pour une éventuelle modification ultérieure. Vous arrivez ensuite à l'étape de la numérisation. Comment dessiner le fond de carte? La notion clé pour le dessin du fond de carte est la généralisation cartographique, qui consiste à dessiner avec rigueur et pertinence les éléments du fond de carte dans leurs traits essentiels. La qualité de ce dessin est primordiale. La généralisation se traduit par une schématisation des tracés, une simplification des formes et par la suppression de certains éléments. Le niveau de généralisation est principalement lié à l'échelle de la carte. Plus l'échelle diminue, plus la simplification est nécessaire. Il tient compte également du thème et du but de la carte. Une carte statistique est plus schématisée qu'une carte thématique nécessitant des localisations géographiques précises. Un atlas de référence présentera des cartes moins généralisées qu'un manuel scolaire. Les particularités de la région à cartographier interviendront également sur le niveau de généralisation. Il y a donc un choix, ou plus exactement une succession de choix à faire, des choix raisonnés qui s'appuient sur des connaissances géographiques. Trois mots clés caractérisent la généralisation : sélection, schématisation et harmonisation. La sélection limite la densité de l'information en déterminant les éléments à conserver et les éléments à supprimer. Par exemple, lors du dessin de la côte, certaines baies seront supprimées, d'autres conservées, voire accentuées. Il en est de même pour les îles, certaines seront conservées, d'autres supprimées ou englobées dans le tracé de la côte. La schématisation simplifie la géométrie des objets en supprimant les sinuosités des tracés. En schématisant, il faut veiller à ne pas trahir les relations géométriques entre les objets, telles que tangentes, séquences, parallélismes, valeurs d'angles, rapports de surfaces. Les tracés ne doivent pas être mous, au contraire ils sont accusés, épurés, plutôt anguleux. Ils n'enveloppent pas les formes mais cherchent à les exprimer dans leurs traits essentiels. Enfin, l'harmonisation est le maintien du même niveau de généralisation pour tous les éléments de la carte. Ne confondez pas la précision et la qualité d'un tracé avec la profusion de détails. Conserver des détails inutiles nuit à la lisibilité du document. Rappelez-vous qu'une bonne carte élimine les détails au profit de l'essentiel, pour offrir une vision claire des phénomènes représentés, et cela à toutes les étapes de sa conception et de sa réalisation. La généralisation cartographique implique qu'un fond de carte n'est pas établi une fois pour toutes. Le niveau de généralisation doit être modifié lorsque la carte est réduite ou agrandie sensiblement. La qualité de la généralisation du fond de carte est déterminante dans la construction de l'image cartographique. On peut dire que c'est déjà la signature du cartographe.