[SON] Voilà mesdames et messieurs, nous nous retrouvons pour cette quatrième semaine de cours, nous avons avancé, avancé dans le contrat. Vous vous souvenez que la, les semaines dernières nous avions vu qu'il fallait faire attention, bien entendu, à l'indication des parties, qui étaient liées par ce contrat, ça peut être plus ou moins simple, suivant la volonté des parties. Ensuite on continue avec un préambule qui n'est pas contractuel, mais qui néanmoins peut donner des indications utiles sur les éléments subjectifs à la base de la volonté des parties, qui seront ensuite utilisées chaque fois qu'on envisagera, soit d'interpréter le contrat, soit le cas échéant d'invalider le contrat pour vice de consentement, bref, chaque fois que des éléments subjectifs jouent un rôle dans la théorie juridique du droit applicable à ce contrat. Et puis ensuite on commence avec l'accord de base, l'accord principal entre les parties. Nous avons vu certaines des clauses essentielles qu'il ne faut pas oublier selon le type de contrat dont il s'agit. Cet accord de base peut être conditionnel, alors on peut intégrer des conditions, des conditions résolutoires, des conditions subséquentes. Et puis le, celui qui doit faire la prestation peut, le cas échéant, garantir la qualité des prestations qu'il va fournir, et ce sont les clauses de garantie, qui suivent, en règle générale, la description de l'accord de base et des conditions du contrat. Une fois qu'on a fait ça, dans le fond l'essentiel du contrat a été fait et on sait exactement ce qui doit être fait, à quelles conditions et selon quelles garanties. Qu'est-ce qu'il reste? Il reste à mettre le contrat dans le système juridique, à faire en sorte que ce contrat déploie ses effets classiques, et les effets classiques du contrat, évidemment, en tous cas le plus classique de ses effets, c'est que s'il n'est pas exécuté correctement, ou s'il n'est pas exécuté du tout, le prestataire de services, ou celui qui devait faire la prestation, est responsable à l'égard de son cocontractant. Et donc la prétention qui en découle est une prétention à dommages et intérêts. Tous les systèmes juridiques prévoient des règles en matière de dommages et intérêts. Les conséquences de la violation ou de l'inexécution, ou de la mauvaise exécution du contrat sont toujours prévues par le droit donc il n'est pas nécessaire, en réalité, d'indiquer dans le contrat que cette conséquence sera la conséquence de la violation du contrat. Le principe selon lequel celui qui viole le contrat doit des dommages et intérêts à la partie adverse est vraiment un principe universel que l'on retrouve dans l'ensemble des ordres juridiques du monde. En revanche, ce que peuvent faire les parties, et en réalité ce qu'elles font assez souvent, c'est moduler cette responsabilité, c'est-à -dire ne pas s'arrêter à l'ordre juridique tel que, avec les solutions qu'il prévoit, mais personnaliser cette prétention aux dommages et intérêts qu'une partie aura contre l'autre en cas de violation du contrat. Alors qu'est-ce qu'on peut faire? On peut faire beaucoup de choses, on peut limiter la responsabilité, par exemple en prévoyant un plafond de responsabilité. Il est possible aussi de conditionner cette responsabilité en disant qu'elle est exclue dans certains cas, les cas de force majeure par exemple. Il est parfois utile de forfaitiser cette responsabilité, parce que le calcul du dommage est souvent quelque chose de difficile, donc les parties peuvent, à l'avance, décider du montant qui devra être payé à titre de dommages et intérêts, en cas de violation du contrat. Et puis il est aussi possible, le cas échéant, ça arrive, d'aggraver la responsabilité légale en prévoyant par exemple, dans le contrat, que la violation du contrat donnera lieu au paiement d'une pénalité. Ce sont les clauses pénales, qui peuvent être intégrées dans le contrat, et qui viennent renforcer les règles légales en matière de responsabilité. Donc, potentiellement, on peut vraiment façonner le droit de la responsabilité, et ne pas s'en remettre à ce que l'ordre juridique offre comme solutions résiduelles en termes de dommages et intérêts. En droit Suisse, ce sont les articles 97 et suivants du code des obligations. Encore une fois quel que soit le droit dans lequel vous évoluez, eh bien vous avez ce principe que la violation du contrat donne lieu à des dommages et intérêts. Il ne s'agit pas de remettre en cause ce principe, il s'agit de le façonner, de le moduler, de l'adapter aux desiderata particuliers des parties. Bon, est-ce qu'on peut tout faire? A vrai dire, pas. Parce que, bien sûr la liberté contractuelle est le principe de base du droit des contrats, mais, tout de même, il y a quelque chose d'un peu paradoxal dans ces clauses qui modifient, surtout celles qui restreignent la responsabilité. Parce que le contrat, en soit c'est un engagement, la base du contrat c'est l'engagement de faire une prestation. On vient de parler des accords de base, l'accord de base c'est l'engagement de faire une prestation, ou l'engagement de payer une certaine somme d'argent en contrepartie. Bon, il y a un caractère évidemment un peu contradictoire entre cet engagement, et puis ensuite, la volonté, par des clauses contractuelles, de limiter les conséquences de la violation de cet engagement. En d'autres termes, de dire que l'on s'engage, et de dire en même temps qu'on n'est pas vraiment, ou pas totalement responsable si l'on n'exécute pas la prestation qui a été prévue. Et c'est la raison pour laquelle, c'est en raison de ce paradoxe, que l'ensemble des ordres juridiques prévoient des règles impératives en matière de responsabilité, non pas pour exclure tout aménagement contractuel de la responsabilité, ce serait excessif, la liberté contractuelle reste encore une fois le principe de base de la rédaction de ces contrats, mais tout de même, pour limiter les possibilités des parties, en termes de plafonnement ou en termes d'exclusion de responsabilité. Alors, en droit suisse nous avons un droit relativement libéral. Il y a tout de même les articles 100 et 101 du code des obligations qui s'appliquent dans ces situations-là , et qui sont des règles impératives. Mais si on fait l'analyse de ces règles, dans le fond elles n'empêchent pas grand-chose. D'après les articles 100 et 101 du code des obligations, il n'est pas possible de limiter sa responsabilité en cas de faute grave d'un des cocontractants, ce qui est une solution assez généralement admise. Mais, un des avantages du droit suisse c'est que, en revanche, il est des avantages en termes de liberté contractuelle en tous cas, c'est que en revanche il est possible de s'exonérer totalement de sa responsabilité pour la faute de ses auxiliaires, même si ces auxiliaires ont, eux, commis une faute grave. Donc la seule chose qu'on ne peut pas faire c'est s'exonérer pour sa faute grave personnelle. C'est le système des articles 100 et 101 du code des obligations. C'est un système assez peu interventionniste, parce que pour vous dire franchement, dans les contrats commerciaux, dans la plupart des cas, si le contrat est mal exécuté, s'il est violé, c'est un auxiliaire d'un des cocontractants, un des employés d'un des cocontractants, qui a commis cette violation du contrat, et qui, le cas échéant, a commis la faute. Et donc, le principe que l'on peut, en droit suisse, s'exonérer de sa responsabilité pour ses auxiliaires fait que, finalement, ces clauses de limitation de la responsabilité sont très efficaces lorsque le contrat est soumis au droit suisse. Vous avez d'autres ordres juridiques qui sont plus interventionnistes, où il est moins facile, ou moins admissible, de s'exonérer ou de limiter sa responsabilité. Et puis il y a un cas particulier en Suisse qui devait rester quelque chose de tout à fait exceptionnel, une sorte de régime un peu plus strict, qui devait s'appliquer aux industries concédées, donc des cas tout-à -fait particuliers comme les chemins de fer ou d'autres industries qui font l'objet d'une concession, et puis finalement le tribunal fédéral a considéré que ça devait aussi s'appliquer aux banques. Et donc évidemment ce régime dérogatoire joue un rôle important parce que la responsabilité bancaire, bien sûr, en droit suisse, génère beaucoup de responsabilités. Et dans ces cas-là , selon ce régime dérogatoire, pour les industries concédées et d'après la jurisprudence du tribunal fédéral pour les banques, les articles 100 et 101 ne permettent de s'exonérer que de la responsabilité pour la faute légère de ses auxiliaires. Tous les autres cas, faute grave de la banque, faute légère de la banque, faute grave d'un auxiliaire de la banque, sont des cas ou l'exonération de responsabilité ne peut pas s'appliquer. Voilà , donc ce sont les spécificités du droit suisse, encore une fois ce cours n'est pas particulièrement un cours de droit suisse, c'est plutôt un cours général sur les modalités de rédaction du contrat donc nous n'allons rentrer plus en détail dans les articles 100 et 101 du code des obligations, mais, ce qu'il est important de noter, c'est qu'il y a toujours, dans tous les ordres juridiques, ce type de règles, qui rendent difficiles, ou en tous cas limitent les possibilités d'exclure ou de façonner la responsabilité. Même si on prend les principes unidroit 2010, qui sont des principes qui essaient de faire une synthèse des ordres juridiques dans le monde en matière de contrats commerciaux, et bien vous avez l'article 7.1.6 qui reprend ce principe, en tous cas qu'en cas de faute grave, une partie ne peut pas se prévaloir d'une exclusion ou d'une limitation de responsabilité. Bon, alors qu'est-ce qu'on fait? On peut décider de faire une clause contractuelle qui correspond à cette législation. Par exemple, il est possible, en droit suisse, d'avoir une clause de ce type, qui va s'afficher, except for fraud or wilful misconduct, X shall not be liable toward etc. Donc sauf en cas, pardon, de faute grave, fraud or wilful misconduct, une partie ne sera pas responsable à l'égard de l'autre, dans telle ou telle situation. Bon, ce genre de formulations, très classiques, elles tendent à prendre en considération ces règles impératives, en tous cas la possibilité de s'exonérer de sa responsabilité en cas de faute grave, que l'on trouve à l'article 100 du code des obligations. Alors, est-ce que c'est nécessaire d'être aussi strict et d'être aussi fidèle aux règles impératives, et donc de les adapter au droit national dans lequel vous vous trouvez? Pas forcément, parce qu'on peut tout-à -fait avoir dans le contrat une clause qui, dont on sait, en soit, qu'elle ne s'appliquera pas dans tous les cas. On peut tout à fait, pardon, avoir dans le contrat une clause qui limite la responsabilité sans réserve, dans la mesure où les parties, en tout cas celui qui bénéficie de cette limitation de responsabilité, est informé, au moment de la conclusion du contrat, que ça ne s'appliquera pas forcément, selon les cas, et notamment que ça ne s'appliquera pas forcément en cas de faute grave. Donc il ne faut pas non plus être un ayatollah de la pureté. du contrat. L'idée n'est pas de faire le contrat le plus licite possible. Peu importe que certaines règles ne soient pas tout à fait conformes à ce qu'il est possible de faire dans la mesure où les parties en sont informées. Ensuite, pour être tout à fait sûr qu'il n'y a pas de problème, on peut rajouter une clause de divisibilité pour être absolument certain que la petite entorse que l'on peut faire par la clause de limitation de responsabilité aux règles impératives ne polluera pas l'ensemble du contrat. Et puis, on peut aussi faire une clause, je dirais, plus sibylline, et ça c'est notamment utile lorsqu'on ne connait pas très bien les règles impératives du système juridique dans lequel on se trouve. Alors, évidemment, en général on retrouve cette idée qu'il n'est pas possible de s'exonérer de sa responsabilité en cas de faute grave, mais il peut y avoir des subtilités, notamment en ce qui concerne la responsabilité pour les auxiliaires. Donc, on trouve parfois ce genre de clauses, qui s'affiche également. To the extent admitted by the applicable law, x shall not be liable to. Dans la mesure admise par le droit applicable, une partie ne sera pas responsable à l'égard de l'autre dans telle ou telle situation. Voilà , c'est une façon, je dirais, assez neutre de formuler ces clauses pour se mettre en conformité avec le droit impératif sans avoir nécessairement une connaissance approfondie de ces règles impératives. Mais en tout cas, l'erreur, évidemment, serait de conclure ces clauses, d'intégrer ces clauses dans les contrats sans informer les parties des limites admises par le droit applicable en termes de limitation de responsabilité. C'est parfois même l'un des critères de choix du droit applicable. Si le droit est trop interventioniste, ça peut être utile de proposer un autre droit applicable pour ce contrat dans la mesure où c'est un contrat international. Bon, même en droit suisse, il faut quand même faire attention à d'autres règles impératives qui peuvent entrer en considération. Vous avez bien entendu la protection des consommateurs, en droit suisse, l'article 8 de la loi contre la concurrence déloyale prévoit qu'une clause qui se trouve dans des conditions générales, dans un contrat conclu avec un consommateur peut être annulée ou considérée comme nulle si elle modifie considérablement, elle déroge notablement au système juridique applicable. C'est l'article 8 de la loi contre la concurrence déloyale. Evidemment, une exclusion, une forte limitation de responsabilité peut être considérée comme une clause dérogeant notablement au régime légal applicable, et donc comme une clause qui est susceptible de nullité au sens de l'article 8 de la loi contre la concurrence déloyale si elle se trouve dans des conditions générales. C'est la même chose en Europe avec la directive européenne sur les clauses abusives. Là encore, évidemment, les limitations de responsabilité peuvent être considérées, le cas échéant, comme des clauses abusives, et si le contrat est conclu avec un consommateur, peuvent être considérées comme nulles par un juge. Et puis, vous avez un certain nombre de lois spéciales qui, dans des domaines particuliers, peuvent aussi intervenir en ce qui concerne ces limitations de responsabilité. Par exemple, en Suisse et en Europe, vous avez une législation sur les voyages à forfait. En particulier, vous avez une directive européenne sur les voyages à forfait. Cette directive a été reprise en droit suisse par une loi fédérale sur les voyages à forfait. Et autant dans la directive qu'en droit suisse, il est prévu, c'est l'article 16 de cette loi fédérale, en ce qui concerne le droit suisse, il est prévu que des limitations de responsabilité ne sont pas possibles en ce qui concerne la responsabilité de l'agence de voyages pour des dommages matériels, et pour des dommages corporels, elles sont possibles mais ça ne peut pas aller plus bas que le double du prix du voyage. Et donc, là encore, il faut faire attention à ces règles, mais elles sont évidemment tout à fait particulières et ça correspond uniquement à des contrats conclus avec des agences de voyage au sens de la loi fédérale sur les voyages à forfait ou de la directive correspondante. Et puis, vous pouvez toujours avoir des débats sur l'article 27 du code civil. L'article 27 du code civil, en droit suisse, c'est la règle très générale du code civil qui protège les droits de la personnalité. Donc, c'est une règle spécifique au droit suisse mais évidemment dont on retrouve l'équivalent dans la plupart des ordres juridiques. Et donc, se pose évidemment la question de savoir si ces limitations ou exclusion de responsabilité ne sont pas contraires aux droits de la personnalité selon, en droit suisse, l'article 27 du code civil. Dans la plupart des cas, non. Lorsqu'il s'agit d'un contrat commercial, il n'y a aucune raison de considérer que ces règles qui façonnent la responsabilité seraient contraires aux droits de la personnalité. Mais, évidemment, lorsque le contrat implique une intervention sur le corps humain, par exemple un contrat médical, une intervention chirurgicale, une intervention de chirurgie esthétique, par exemple, l'idée qu'on puisse limiter sa responsabilité alors que le dommage pourrait être un dommage à l'intégrité corporelle d'une des parties est une idée qui est discutable. Il n'y a pas d'arrêt du Tribunal Fédéral sur cette question, et donc il n'y a pas de principes acquis en droit suisse selon lesquels en matière de dommages à l'intégrité corporelle, une clause de limitation de responsabilité ne serait pas valable. Mais en revanche, il y a une abondante jurisprudence sur ce que l'on appelle le consentement éclairé du patient, c'est-à -dire l'idée qu'évidemment, lorsque le médecin opère, il doit informer totalement le patient sur les conséquences de l'opération. Et je pense, finalement, que c'est une meilleure solution d'avoir traité ça sous l'angle du consentement éclairé du patient plutôt que sous cet aspect des droits de la personnalité et de l'article 27 du code civil. Mais enfin, vous trouvez quand même certains auteurs qui reviennent à cet article 27 du code civil en matière de contrats médicaux. [AUDIO_VIDE]