[MUSIQUE] [MUSIQUE] Avant de vous parler des rites et des cérémonies, je souhaite faire deux observations préliminaires. Tout d'abord, l'Afrique est un continent composé de milliers de peuples, de milliers de langues et de milliers de cultures. Donc, dans un espace de temps réduit, il est difficile de parler de tous les rites existant sur le continent africain. La deuxième remarque préliminaire renvoie au fait que les sociétés africaines sont des sociétés en transition. La question des rites et des cérémonies est plutôt une question relative aux populations rurales et à certains peuples. Souvent, dans les régions urbaines, les nouvelles générations ne connaissent plus les rites traditionnels, mais pratiquent, par contre, des rites liés à l'Islam et au christianisme. Première question sur les rites et les cérémonies : quel est l'objectif des rites et des cérémonies? Les rites et les cérémonies ont pour objectif de marquer un changement de statut social ou sexuel d'un individu. Les sociétés qui pratiquent les rites et les cérémonies font ces rites pour marquer un changement. Les rites peuvent être très divers. Il y a des rites liés à la naissance, à la circoncision, à la puberté, à la mort. Il y a des rites également liés à certaines activités comme la pêche, la chasse, des activités religieuses, et donc, il y a une variété extrême de rites. À l'occasion des rites, les communautés, la famille élargie va organiser des cérémonies pour marquer ce passage. Ces cérémonies incluent des épreuves. Par exemple, les rites qui marquent le passage de l'enfance à l'adolescence peuvent faire l'objet d'épreuves où on teste les adolescents pour juger s'ils sont dignes de devenir adolescents ; et plus tard, on va aussi les tester pour juger s'ils sont dignes de devenir adultes. Pourquoi il est important de vous parler des rites dans ce contexte de l'éducation et de la pédagogie en Afrique? Je pense qu'il est important de vous parler de rites parce que ces rites vont influencer l'identité de l'apprenant. Même si l'apprenant fréquente une école moderne, le fait de faire une expérience de rites traditionnels va influencer sa manière d'apprendre et de comprendre l'école. Deuxième point que je souhaite clarifier dans cette vidéo c'est la différence entre les rites de passage et les rites d'initiation. C'est une différence technique, mais j'aimerais quand même l'expliquer pour vous. Les rites de passage sont des rites que tous les membres d'une communauté doivent passer. Autrement dit, la naissance est un rite que nous connaissons tous. La mort aussi. Les rites de passages sont des rites systématiques. Les rites d'initiation sont des rites différents. Ils concernent seulement une partie de la population. On va choisir une partie des jeunes pour leur faire passer des rites d'initiation. Quand on dit rites d'initiation, ils sont réservés à une minorité. Il y a une diversités de rites de passage et de rites d'initiation sur le continent africain. Un autre point important sur les rites et les cérémonies est de distinguer les affiliations lignagères et les affiliations électives. Ce sont des termes techniques que les anthropologues ont mis en évidence en Afrique. Quand on parle de lignage en Afrique, il y a un peu le lien de sang. C'est-à-dire, au sein d'une famille, on va faire un rite de passage pour marquer l'appartenance de l'individu à un lignage particulier, à une tribu. Il faut distinguer ce type de cérémonie de rite avec un autre type de cérémonie qui signale le choix de l'individu de s'affilier à un groupe. Ce qui est intéressant en Afrique, il y a les deux processus en même temps. Il y a les processus liés au sang, au lignage, mais il y a aussi un processus lié au choix, où l'individu, même s'il n'a pas de lien de sang avec un lignage ou une famille, peut choisir de rentrer, par exemple, dans la communauté de chasseurs-cueilleurs, dans une communauté donnée. Et toute la population n'est pas chasseur. Pour devenir chasseur, notamment en Afrique de l'Ouest, il faut faire preuve d'une volonté de rentrer dans ce groupe de chasseurs. Il existe trois principaux types de rites et de cérémonies en Afrique : des rites de séparation, des rites de transition et des rites d'incorporation. Évidemment, ces rites sont plus ou moins présents selon que l'individu habite dans une zone rurale, zone urbaine, et selon les peuples et les cultures en question. Maintenant, il est important de dire : est-ce que dans nos sociétés modernes post-industrielles nous n'avons plus de rites? La réponse est non. Même dans les sociétés les plus contemporaines, nous maintenons un certain nombre de rites. On peut parler, par exemple, de rites de séparation. Quand on jeune enfant de trois à quatre ans fréquente l'école maternelle pour la première fois, il faut le séparer de ses parents. Et on voit les crèches, par exemple, organiser un moment de séparation. On peut vraiment qualifier ça de rite de séparation. Il peut y avoir aussi des rites de transition, et aussi des rites d'incorporation. Dans les sociétés contemporaines, les rites de transition et d'incorporation sont liés, par exemple, au changement de statut quand on passe du statut d'élève au statut d'un jeune adulte qui est en formation professionnelle. On peut aussi parler de rite d'incorporation quand un civil ou quelqu'un qui n'a pas fait son service militaire s'incorpore à l'armée. Et il peut y avoir un certain nombre de cérémonies, entre guillemets, pour marquer cette incorporation. Pour conclure, il me semble important de dire que les rites et les cérémonies sont un élément important dans l'identité des jeunes en Afrique et ailleurs. Et nous devons être attentifs sur les liens entre bien passer ces rites de passage et ces rites selon différentes modalités, et avoir une cohérence entre les rites de passage, mais aussi l'identité des jeunes. Et cette identité, ces rites de passage vont influencer la manière dont le jeune va s'intégrer dans les institutions éducatives modernes. Peut-être qu'il faut aussi dire qu'en Afrique, en milieu urbain, et j'ai eu récemment l'occasion de le mesurer, les rites d'initiation traditionnels, les cérémonies traditionnelles ne sont pratiquement plus pratiqués, notamment par la classe moyenne. Cela ne veut pas dire qu'en tant que pédagogues, nous ne devons pas nous intéresser à analyser ces rites, mais il est important de dire que, dans de nombreux lieux en Afrique, les rites traditionnels ont été remplacés, comme en Europe, par des rites dits plus modernes liés à la religion islamique ou à la religion catholique, mais aussi liés à l'entrée à l'école. [MUSIQUE] [MUSIQUE]