[MUSIQUE] [MUSIQUE] Bonjour Marc Vouillamoz, nous sommes à l'UEFA à Nyon au bord du lac Léman. Est-ce que vous pourriez vous présenter en quelques mots? >> Bienvenue à l'UEFA, mon nom est Marc Vouillamoz, je travaille depuis 20 ans au sein de l'Union européenne de football, et j'ai la charge du programme antidopage et médical depuis 10 ans. >> Merci. Alors, le dopage dans le football, si on fait un petit état des lieux, on a Sepp Blatter, le Président de la Fédération internationale, qui confiait à un magazine de football qu'il n'existe aucun produit capable de faire d'un mauvais joueur un bon joueur, et d'un bon joueur un grand joueur. Et puis aussi Didier Deschamps qui disait à la Juve en 2001 que je vois pas l'utilité du dopage dans le football. Alors est-ce que c'est des propos sur lesquels on peut s'appuyer en disant ben finalement il y a pas de problème dans le football. >> Je crois qu'il faut être très attentif à tout problème de dopage, quelque soit le sport. Je pense que le football n'est pas un sport qui est épargné. Il est possible que des substances interdites soient prises pour améliorer sa performance dans le football. Donc, je pense qu'il faut faire très attention à la manière dont on exprime la problématique du dopage dans le football. >> Merci. Et sur, quand on aborde cette problématique du dopage, on est aussi confronté à différents pays. Vous êtes une organisation internationale, européenne, vous avez différents types de pays, différents types de culture et, est-ce que la lutte contre le dopage dans le football aujourd'hui commence à s'uniformiser? Est-ce que, qu'est-ce qui se passe? Ça fonctionne bien? >> Ecoutez, pour le football ça fonctionne bien depuis de nombreuses années. Le football n'a jamais rencontré de problème majeur lorsque nous avons effectué des contrôles à des compétitions, voire hors compétitions. Nos contrôleurs n'ont jamais subi de contraintes ou d'obstruction de la part des autorités gouvernementales, et cela, même quand ils devaient transférer ou transporter des échantillons d'un pays à un autre. Donc, pour le football, non, pas de problème majeur. Je sais que dans d'autres sports, par les informations reçues de mes collègues que leurs contrôleurs ont eu des problèmes lors des prélèvements, lors des transferts, mais pour le football pas de problème majeur. Ce qu'il faut dire aussi, c'est que, avec la mise en place du nouveau code mondial antidopage 2015 qui vise à améliorer, à étendre la collaboration et la coordination entre les fédérations internationales et les agences nationales antidopage, on voit que il y a maintenant une volonté d'aller de l'avant et de collaborer. >> Donc, on est loin, il y a les années 2000 et où on avait encore l'affaire Fuentes. Alors, on sait pas si c'est des footballeurs, des joueurs de tennis, d'autres sports, on avait les cyclistes, on a donné les cas des cyclistes. Aujourd'hui les états collaborent davantage qu'il y a une quinzaine d'années? >> Alors, je pense, tout le monde, tous les acteurs de la lutte antidopage collaborent de manière plus >> ouverte avec les partenaires. Je pense que aussi certaines fédérations internationales n'avaient pas un programme qui était collaboratif. Je pense que tout le monde a appris les leçons du passé, et maintenant on veut aller de l'avant et mettre en place un programme qui soit efficace et crédible. >> Est-ce que dans les relations avec les états, l'UEFA a un poids suffisant pour dynamiser ou aller vers une harmonisation des législations sur l'antidopage? >> Alors je crois que le, l'institution qui a ce poids, qui a cette tâche, ce devoir, >> c'est avant tout l'Agence mondiale antidopage qui, donc, avec son code mondial, a pour but d'harmoniser les procédures dans tous les sports et dans tous les pays. C'est clair que l'UEFA va tendre par sa force politique, faire en sorte que les choses avancent et puissent se développer dans une harmonie et dans une collaboration. >> Et donc, ce qui veut dire que vos, les dispositifs antidopages de l'AMA satisfont généralement à ce que veut faire l'UEFA, ça vous convient, ce qui est. >> Totalement. Je pense que le code mondial, comme je le disais, a pour but de créer un niveau de jeu égal à tous les sportifs dans tous les sports sur tous les continents. Donc, c'est ce que l'UEFA recherche, à savoir que toutes les, tous les joueurs, toutes les équipes qui participent à nos compétitions le fassent dans les mêmes règles de jeu, que ça soit sportif ou dans le cadre de l'éventuel prise de produits dopants. >> Et si on compare le rôle de l'UEFA, comment on situe l'UEFA par rapport à l'Agence mondiale antidopage, la FIFA ou les agences nationales? Quel est le rôle particulier sur l'antidopage de l'UEFA? >> Alors l'UEFA se focalise principalement sur les compétitions de l'UEFA, donc nous avons un programme d'éducation et un programme de contrôle antidopage >> qui s'applique à toutes les compétitions de l'UEFA, quel que soit le niveau de compétition, et là je peux, on parle souvent du programme antidopage en Ligue des champions, en Europa Ligue. Oui, certes, nous effectuons un grand nombre de contrôles mais nous effectuons aussi des contrôles dans les compétitions féminines, dans les compétitions junior et dans les compétitions foot salle. Donc nous ne laissons aucune compétition sans avoir un programme qui soit adapté à cette compétition. >> Et un stakeholders, donc un partenaire très important, >> ce sont les grands clubs de l'UEFA qui sont les clubs dominants au niveau mondial, est-ce que ces clubs collaborent bien à la lutte antidopage? >> Alors on a vu une évolution ces 10 dernières années puisque, je le disais tout à l'heure en introduction, le programme antidopage de l'UEFA date de 2005. Je me souviens très bien quand nous avions mis en place le programme de localisation pour les équipes de la Ligue des champions. La première année ça n'a pas été très simple, ça n'a pas, il a fallu faire preuve de courage, d'autorité, pour imposer ce processus, et je vois 10 ans après, c'est un processus maintenant qui est tout à fait accepté et qui est tout à fait légitime. >> Et donc, on a une évolution de ce suivi, alors prévention et répression, et donc vous, vous estimez qu'il y a une efficacité qui s'accroît. Est-ce qu'on a des chiffres, des données, sur l'amélioration de ce qui est fait? >> Alors, le nombre de contrôles, je dirais, est en constante augmentation, parce que aussi le nombre de compétitions de l'UEFA augmente, parce que nous souhaitons aussi effectuer >> des contrôles hors compétition, parce que nous souhaitons effectuer des contrôles sanguins, parce que nous souhaitons effectuer, mettre en place un passeport stéroïdien, donc automatiquement pour atteindre ces objectifs, le nombre de contrôles doit augmenter, doit toujours rester en proportion avec le nombre de matchs, de compétitions, mais >> la tendance est plutôt à l'augmentation. Maintenant est-ce qu'il est efficace? La question est difficile parce que si on regarde les statistiques de l'AMA, le nombre de contrôles positifs dans le football est relativement faible, on parle de 1, 2, 3 cas maximum par année dans les compétitions de l'UEFA, ce sont souvent des contrôles positifs pour des substances telles que le cannabis, la cocaïne, donc des drogues récréatives on va dire, donc c'est très difficile de dire est-ce que parce que le programme de l'UEFA a un niveau de dissuasion tel que il va permettre d'avoir peu de cas qui seront positifs ou est-ce qu'il y a des substances qui sont encore indétectables, des méthodes qui sont pour les laboratoires antidopage impossibles à détecter? Ca c'est difficile à dire, mais je pense que les méthodes d'analyse sont sans cesse perfectionnées, deviennent de plus en plus pointues, et je pense que le gap ou l'écart entre ceux qui veulent tricher et les laboratoires antidopage a plutôt tendance à diminuer ces dernières années. >> Et le passeport stéroïdien, ou le profil stéroïdien, on voit que ça c'est un progrès. Vous faites un ciblage au hasard, comment ça se passe avec ce? >> Alors le passeport >> stéroïdiens, justement l'avantage, c'est qu'on ne sera plus dans le vague, sur les équipes et les joueurs, parce qu'il va permettre de suivre sur la durée les valeurs, le profil, d'un joueur, voire d'une équipe si l'on décide de prendre tous les joueurs d'une équipe. Et donc les tests vont cumuler des valeurs, dans ce profil, qui permettront de voir si il y a des différences dans les valeurs individuelles de ces joueurs. Donc ça va être beaucoup plus pointu, beaucoup plus fin, comme méthode de détection antidopage. >> Et là , pour faire ça, vous collaborez avec un laboratoire, je crois que c'est le laboratoire d'analyses du dopage, avec lequel vous collaborez? >> Alors effectivement, notre partenaire qui va justement vérifier ces passeports stéroïdiens, >> pour l'UEFA, est le laboratoire antidopage de Lausanne, qui a une très grande expérience dans la matière, qui a toujours été parmi les laboratoires de pointe en Europe. Et donc, nous allons travailler en collaboration avec eux, et c'est en fait le laboratoire, qui va nous avertir lorsque des valeurs vont rentrer dans les passeports, s'il y a matière à aller vérifier quelque chose, s'il y a une suspicion, s'il faut aller cibler un joueur ou une équipe. >> Donc là , ce sont des aspects plutôt contrôle, est-ce que en amont, vous faites un travail sur la prévention? >> La prévention est un élément capital. L'UEFA, depuis toujours, depuis 2005, a mis beaucoup d'efforts dans l'éducation. Nous avons un programme spécifique pour les jeunes. Tous mes collaborateurs vont sur le terrain, lors de tournois finaux, et vont adresser un message de prévention et d'information, à tous les joueurs de toutes les équipes qui participent aux tournois finaux. Donc nous arrivons à toucher environ, de 1 000 à 1 500 joueurs par année, de jeunes joueurs, probablement des joueurs qui, un jour, évolueront au sein de grands clubs. Donc ça, c'est un volet du programme. Un deuxième volet du programme, c'est d'avoir, de mettre à disposition sur le site Internet de l'UEFA, des informations concernant la prévention antidopage. Donc il y a un module spécifique antidopage sur uefa.org, qui va permettre à tout un chacun, joueur, médecin, entraîneur, d'aller obtenir des informations et de pouvoir utiliser ces outils, pour organiser, de leur côté, une séance d'information, de prévention auprès de leurs joueurs. >> Pour l'instant, ce sont des modules que les gens choisissent, >> est-ce qu'à plus long terme, dans la formation des entraîneurs, des médecins, est-ce qu'on imagine un système d'accréditation possible, ou une obligation d'avoir ce type de formation? >> Alors, c'est une question très intéressante, parce que nous avons commencé ce processus, nous avons un programme de formation >> pour les médecins européens, qui s'appelle le Football Doctor Education Program, et qui se décline en trois modules. Et le dernier module, que nous venons de livrer au mois de mai de cette année, contient la problématique antidopage, et la sensibilisation que nous souhaitons que les médecins d'équipes, apportent au sein de leurs associations, au sein de leurs clubs, auprès de leurs joueurs. Donc c'est quelque chose que nous allons encore développer. Pour le moment, nous avons formé un médecin par équipe nationale ; l'idée est que le programme fasse boule de neige, et donc, nous mettons à disposition les outils, les informations, à ces médecins pour que eux, ensuite, organisent des cours au niveau national, et que ce programme fasse boule de neige. Nous avons également publié un manuel, avec un grand libraire, une grande entreprise spécialisée, qui permettra galement de diffuser ce savoir. >> Est-ce que l'on arrive à mesurer l'efficacité des programmes de prévention? >> C'est compliqué. C'est surtout basé sur le retour des médecins, c'est aussi lors des tournois finaux, basé sur le retour des joueurs qui participent à ces séances d'information. Généralement, ce retour est toujours très positif. Mais est-ce qu'il est toujours, nous permet toujours d'adapter nos moyens, il y a une reconnaissance que oui, c'est intéressant, c'est utile, mais il n'y a pas d'indication pour nous, d'aller dans une direction pour améliorer le message, ou le clarifier, sur certains domaines. >> Et si, pour conclure, vous aviez quelques mots à dire sur quels progrès >> pourraient encore être faits sur la lute antidopage dans le football, vous nous diriez quoi? >> Le chantier n'est pas terminé. Je pense que, dans le football, nous souhaitons toujours rester à la pointe, à la pointe de tout développement. Que ce soit du côté de l'organisation des compétitions, de la compétence de nos officiel ; nous cherchons aussi je dirais, à atteindre la mise en place d'un programme antidopage le plus pointu possible, le plus efficace possible. Parce que nous ne souhaitons pas avoir un sport qui représente un problème dans le dopage. Nous souhaitons vraiment défendre les valeurs sportives, les valeurs éthiques du sport, et du football en particulier. >> Merci beaucoup. >> Merci à vous. [MUSIQUE] [MUSIQUE]