[MUSIQUE] Bonjour à tous et bienvenue dans cette nouvelle vidéo! Vous connaissez les termes de consommation durable, de consommation responsable ou de consommation collaborative. Est-ce une mode marketing ou des modèles d'avenir? Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous sommes dans ce que l'historie Henri Lefèbvre appelle la société de consommation. La consommation est le moteur du système capitaliste, fondé sur l'accumulation de biens. Ce qui amène le philosophe Jean Baudrillard à affirmer que la consommation n'est plus liée majoritairement à la satisfaction des besoins, mais à une volonté de se différencier des autres. Il est vrai que le volume annuel de consommation de chaque Français est trois fois plus élevé aujourd'hui qu'en 1960. Et des mouvements de contestation de cette logique d'accumulation de biens ont émergé au milieu des années 60. Mais depuis les années 90, c'est la soutenabilité même de ce modèle qui est interrogée. Lors du Sommet de Rio, en 1992, le Sommet des Nations Unies consacré aux questions planétaires, les chefs d'État posent l'objectif de consommation durable. Afin de parvenir à un développement durable et à une meilleure qualité de vie pour les peuples, les états devraient réduire, puis éliminer les modes de production et de consommation non viables. Et la consommation est effectivement un sujet environnemental majeur. 52 % de nos émissions de gaz à effet de serre sont liés à notre consommation et, tout particulièrement, aux produits importés. C'est ce que nous appelons l'empreinte carbone. C'est-à -dire l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre liées à notre mode de vie. Nous nous félicitons d'avoir baissé nos émissions de gaz à effet de serre de 12 % depuis 1990. Mais si nous prenons en compte les importations qui ont été nécessaires pour notre consommation, ce chiffre n'est pas en baisse, il est en hausse et même en forte hausse. Le ministère du Développement durable a calculé que l'empreinte carbone de chaque Français a augmenté de 14 % entre 1990 et 2007. Et ce qui est vrai en France, l'est dans la plupart des pays développés. La première limite de notre modèle de consommation est donc sa contribution aux dérèglements climatiques. La deuxième limite est la disponibilité de nos ressources. Au-delà de la seule question des gaz à effet de serre, nous devons prendre en compte la surface nécessaire pour produire les ressources utilisées par une population et absorber les déchets produits. C'est le concept d'empreinte écologique, développé par le WWF. Ce concept prend en compte six grands critères que vous découvrez. Cet indicateur montre que le mode de vie occidental n'est pas transposable à l'ensemble des habitants de la planète. En 1999, le WWF a calculé que si tous les humains vivaient comme un Français, il nous faudrait trois planètes. Au-delà des impacts écologiques, nos modes de consommation posent des problèmes sanitaires. Alors que 1 milliard d'habitants souffrent de la faim, 1,3 milliard sont en surpoids ou obèses. Alors que nos débats sont focalisés sur les maladies transmissibles, 50 % de la mortalité mondiale est liée aux maladies non transmissibles, d'origine alimentaire. Savez-vous qu'une alimentation saine est une consommation de 3 000 calories seulement par jour, dont seulement 500 d'origine animale? Nous devrions donc, théoriquement, diviser par deux notre consommation de viande et de poisson dans les pays de l'OCDE. Et naturellement, je ne peux traiter de la société de consommation sans aborder la question des inégalités. 1 milliard de personnes souffrent de la faim, 3 milliards souffrent de malnutrition, nous l'avons vu. Le commerce international ne profite que marginalement aux producteurs des pays en voie de développement. Ce graphique décomposant le prix d'un paquet de café est assez éloquent. Le producteur touche moins de 10 % du prix final. Ces réalités écologiques, sanitaires et sociales sont à l'origine de plusieurs initiatives pour une société de consommation plus durable. Vous connaissez naturellement les initiatives les plus anciennes. Le commerce équitable, l'agriculture biologique et les labels environnementaux. Le commerce équitable a été reconnu par les Nations Unies à partir de 1964. Le slogan des pays du sud est Trade not Aid : du commerce, pas de l'aide. L'objectif du commerce équitable est donc de répartir de manière plus juste, les revenus de la vente entre les producteurs, les intermédiaires et les revendeurs. C'est une démarche qui est perçue très favorablement par 70 % de nos concitoyens, mais le commerce équitable demeure marginal. Seulement 10 millions de personnes en vivent. L'agriculture biologique est née en Autriche et en Allemagne dans les années 20. Puis en France en 1950, au sein de mouvements opposés à l'intensification de l'agriculture. C'est donc une agriculture qui exclut les produits chimiques de synthèse, les OGM et les irradiations, dans un souci de protection de l'environnement et indirectement, de protection de la santé. L'agriculture biologique est en forte croissance. Elle l'est en France. Vous voyez sur ce schéma que depuis 2001, son chiffre d'affaires a été multiplié par 4. Elle l'est en Europe aussi. 20 % des terres agricoles autrichiennes sont en agriculture biologique. La production espagnole a été multipliée par 4 en 11 ans. Pour autant, leur part dans la consommation alimentaire reste en France inférieure à 2,5 %. Vous connaissez également les écolabels ou éco-certificats. Le principe est né au milieu du XXe siècle, quand les grandes organisations des Nations Unies se sont alertées de la déforestation massive en Amazonie et en Afrique. Les premiers écolabels ont donc été concernés par la gestion de la forêt et se sont multipliés pour essayer d'orienter les consommateurs vers des produits plus respectueux de l'environnement. Les écolabels sont profusion. L'Ecolabel Index a recensé 458 écolabels dans 197 pays. À côté des labels officiels, vous trouverez des étiquetages propres aux producteurs ou aux distributeurs. Alors sachez que vous pouvez faire confiance à ces deux labels officiels : L'Ecolabel européen et le Label écologique français de la marque NF environnement. En France, 555 entreprises sont certifiées par L'Ecolabel européen et 140 par la marque NF environnement, ce qui est encore marginal. Vous l'avez donc constaté, ces différentes initiatives, commerce équitable, agriculture biologique, écolabels, ont pour objectif commun d'orienter les choix des consommateurs vers des produits plus respectueux de l'environnement ou plus équitables et s'inscrivent donc la logique de la société de consommation, puisqu'elles ne contestent pas le principe même de l'accumulation de biens. De nouveaux mouvements émergent autour d'une idée simple. La consommation doit privilégier la qualité sur la quantité. Consommer mieux plutôt que plus. Pierre Rabhi a inventé ce concept de sobriété heureuse, en d'autres termes, le bonheur se trouve dans la mesure, dans l'équilibre. Cette révolution philosophique reste encore marginale en France. Par contre, un mouvement est en très forte expansion. Celui de la consommation collaborative. L'idée est double. D'une part, il n'est plus nécessaire de posséder un bien pour l'utiliser. Pourquoi acheter une voiture, alors qu'on peut la louer ou se la prêter? D'autre part, il est préférable d'échanger entre particuliers, plutôt que s'adresser à des intermédiaires, que ce soient des entreprises ou des commerces. La consommation collaborative, vous la connaissez, c'est BlaBlaCar, Leboncoin, les vélos en libre-service, Airbnb ou encore Couchsurfing. C'est un mouvement né dans les années 2000, grâce aux nouvelles technologies. Et le phénomène prend une ampleur croissante, comme vous pouvez le constater sur cette enquête. Selon l'entreprise PwC, cette économie pourrait atteindre 270 milliards d'euros d'ici dix ans, contre 12 milliards aujourd'hui. Et l'intérêt écologique est évident. Le covoiturage permettrait à l'échelle nationale de baisser de 4 % au moins, nos émisions de gaz à effet de serre. Le partage ou la revente d'un bien usagé permet d'éviter de prélever des ressources pour les produire. Savez-vous que le temps moyen d'utilisation d'une perceuse sur toute sa durée de vie est de 12 minutes seulement? Vous imaginez les bienfaits de son partage. Naturellement, cette nouvelle forme d'échange entre particuliers n'est pas sans poser de difficultés pour le système économique existant. Par exemple, Airbnb est une concurrence pour les hôteliers qui ne sont pas soumis aux mêmes exigences. Mais plus encore, cette nouvelle forme d'échange peut constituer un nouveau modèle économique. Jeremy Rifkin, dans son livre La nouvelle société du coût marginal zéro, affirme que d'ici 30 ans, le capitalisme sera concurrencé par une société du partage et de la gratuité, en dehors des systèmes traditionnels. Ce qui inévitablement remettra en question notre organisation économique et sociale. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler. Je vous remercie de votre attention. [AUDIO_VIDE]