[MUSIQUE] Deuxième question, vers quels financeurs se tourner? Une fois que l'entrepreneur a décidé qu'il lui faut lever des fonds, il reste encore à déterminer le type ou les types de financeurs qu'il doit solliciter. Nous revenons ici à la notion de thèse d'investissement développée dans le premier MOOC. Il s'agit pour l'entrepreneur de chercher des financeurs dont la thèse d'investissement en termes de stade de développement, de ticket, d'instruments de financement, de secteur, de géographie correspond le mieux à son projet. Arrêtons-nous un instant à l'une des composantes essentielles de la thèse d'investissement, les instruments de financement. Une gestion cruciale est en effet de savoir si l'entrepreneur a besoin de dettes ou de fonds propres, ou bien encore de financements hybrides. Il lui faut pour cela étudier dans le détail son besoin de financement. Nous revenons ici aux différents instruments de financement présentés au module 4 du premier MOOC auquel je vous invite à vous reporter si nécessaire. Et nous allons ici chercher à mieux comprendre les situations dans lesquelles il est intéressant d'y faire appel. Première question, dans quelles conditions privilégier l'endettement? Rappelons rapidement le principe de la dette comme modalité de financement, l'entreprise reçoit une somme qu'elle s'engage à rembourser selon un certain échéancier avec un certain nombre d'intérêts. La logique veut qu'on privilégie l'endettement dans le cas général puisque cette forme d'investissement ne nécessite pas de céder une partie du capital et donc une partie de la propriété, du contrôle de la société, mais à deux conditions. Et nous allons voir que ces conditions sont relativement contraignantes. La première c'est que l'entreprise doit générer des flux de trésorerie, on parle de cash flow qui sont suffisants pour faire face à un échéancier de paiement d'intérêts et de remboursement du principal bien précis et déterminé à l'avance. Le paiement des intérêts se fait, je le rappelle, au détriment de l'investissement dans l'activité. La deuxième condition est que l'entreprise doit présenter un niveau de risque acceptable pour les prêteurs puisque ces derniers n'ont pas de pouvoir politique sur la société. Alors, soit par une visibilité importante sur l'activité et la trésorerie, autrement dit une fois un certain stade de développement atteint, une fois les premières preuves réalisées, soit par la mise en garantie d'actifs que le prêteur pourrait saisir en cas de défaut ou que l'entreprise pourrait mettre en vente pour satisfaire son échéancier de remboursement, par exemple si l'entreprise dispose d'équipements industriels qui sont faciles à vendre sur un marché. Troisième hypothèse, une structure de coûts flexible permettant facilement de réduire les dépenses de l'entreprise en cas de coup dur, et donc de continuer à honorer le service de la dette. Voyons maintenant dans quelles conditions privilégier les fonds propres. On a bien vu que l'endettement n'est clairement pas adapté à toutes les entreprises, en particulier pour celles qui génèrent un bas niveau de cash flow ou soit n'en génèrent pas du tout parce qu'elles n'ont pas encore atteint la rentabilité, ou pour des entreprises qui présentent un risque élevé avec peu de visibilité sur la génération des cash flows car elles en sont aux prémices de leurs activités [INAUDIBLE] innovation par nature risquée et elles ne présentent donc pas d'historique qui permette de juger de la solidité de leur [INCONNU] ni d'actifs suffisants pour juger de leur capacité à honorer les engagements financiers. Cela concerne donc toutes les entreprises en phase d'amorçage ou en changement d'échelle, qui cherchent à développer une activité, ce qui exige des investissements initiaux sachant que l'activité peut ne pas être immédiatement rentable. Dans ces conditions, l'entreprise devra faire appel en priorité à des fonds propres, puisqu'ils ont l'avantage de ne pas exiger de remboursement à une date précise mais cela implique alors pour l'entrepreneur, on l'a dit, de céder une partie de la propriété et donc du contrôle de la société. Suivant le stade de développement de l'entreprise, l'entrepreneur fera appel à des investisseurs en fonds propres de différents types présentés précédemment et sur lesquels nous allons revenir à présent. Le love money, l'argent des proches, les 3F, vous vous rappelez précédemment, Family Friends and Fools peut être mobilisé au démarrage du projet pour des sommes plutôt peu élevées. Même faible, cet apport de fonds propres permet d'amorcer le projet, de développer un premier prototype. Le risque de perte en capital est très fort mais les investisseurs ont une exposition limitée vu le montant de leur apport, et ils valorisent surtout l'aide qu'ils vont apporter au porteur de projet. Ensuite, les Business angels. Ce type d'investisseurs est mobilisé également au démarrage du projet, en principe quand ce projet a déjà pris une forme suffisante pour que l'entrepreneur soit simplement en capacité de communiquer et de convaincre sur son potentiel. L'investissement présente encore un niveau de risque très important, mais les Business angels ont une appétence au risque importante. C'est leur propre argent, ils diversifient leurs placements, il leur tient à cœur surtout de soutenir des projets entrepreneuriaux. Troisième catégorie, les investisseurs en capital risque, qui sont mobilisés quand le projet a davantage pris forme avec des degrés différents bien sûr. On peut en être encore à développer un prototype ou avoir déjà lancé la commercialisation, tout dépendant en fait du potentiel du projet. Le niveau de risque reste fort avec un potentiel qui reste encore à démontrer, qui dépend principalement de la capacité d'exécution de l'entrepreneur. Quatrième catégorie, les investisseurs en capital-développement sont à solliciter quand le projet a fait sa preuve de concept, sa preuve de marché, autrement dit que la commercialisation a été lancée et que l'offre a trouvé un premier marché avec une certaine traction commerciale constatée. C'est l'heure du changement d'échelle. L'entreprise peut être déjà rentable, avec un niveau de cash flow relativement stable sur son périmètre initial, mais le changement d'échelle nécessite d'investir des ressources qui ne peuvent être financées en dettes puisqu'elles sont exposées à un niveau de risque qui reste fort. Le capital-développement investit des tickets plus importants puisque le changement d'échelle suppose des forts investissements. Enfin, le capital-transmission. Avec cette modalité, on rentre dans une logique différente puisqu'il ne s'agit plus de lever des capitaux pour financer l'entreprise, mais d'une transmission du capital entre investisseurs. On parle de transactions de financements secondaires, par opposition aux financements primaires, qui correspondent à de nouvelles ressources pour l'entreprise. Ce type d'investissement, bien qu'il n'amène donc pas de nouvelles ressources financières, peut être l'occasion d'impulser un changement à la tête de l'entreprise puisque les actionnaires changent, et la gouvernance ainsi que le management sont le plus souvent modifiés. Attention, les frontières entre les différents types de fonds propres ne sont ni strictes ni étanches. Elles dépendent largement des secteurs d'activité, voire même des entreprises. Par ailleurs, un entrepreneur ne mobilise pas forcément l'ensemble de ces différents types de fonds propres. En revanche, il y a de fortes chances pour que ces différents types d'investisseurs cohabitent et/ou se succèdent au capital. Il est donc important de bien déterminer le stade de développement de l'entreprise pour en déduire la nature de son besoin de financement et le type d'investisseur à viser. En récapitulatif, on peut dire que les fonds propres sont à privilégier pour couvrir les pertes d'exploitation, en particulier au lancement de l'activité, quand le chiffre d'affaires généré n'est pas encore suffisant pour couvrir les coûts fixes ou pour son accélération, c'est-à -dire son passage à l'échelle. La dette, elle, est à privilégier pour l'investissement dans des actifs tangibles, équipements pouvant être facilement revendus et convertis en cash pour rénover le service de la dette si l'exploitation ne générait pas le cash nécessaire. Plus une entreprise est mature, autrement dit plus elle a démontré la pertinence de son activité et a trouvé sa rentabilité, plus elle va pouvoir mobiliser un financement en dette. Enfin, pour reprendre un point présenté dans le MOOC précédent, je souhaite revenir sur une question importante, à quoi servent les financements hybrides. Nous l'avons vu au module 4 du premier MOOC. Les financements hybrides regroupent principalement les instruments de dette dont le remboursement est moins prioritaire que celui de la dette bancaire, et qui peuvent dans certains cas se transformer en capital. Nous les avons décrits au module précédent. C'est l'obligation convertible, la dette subordonnée ou encore le prêt donneur. Les financements hybrides ont donc pour caractéristique principale leur flexibilité, ce qui est très pratique pour des entreprises encore jeunes qui présentent une visibilité limitée sur leur cash flow. Tout en étant flexibles, ces instruments présentent l'avantage d'être dans un premier temps non dilutifs, c'est-à -dire que l'entrepreneur n'aura pas besoin de céder immédiatement une partie de son capital, ce qui aurait impliqué de valoriser l'entreprise avec toutes les difficultés que cela comporte lorsqu'une entreprise est encore jeune. Pour terminer cette vidéo et ce bref panorama, il nous faut traiter du cas des organisations dont le statut juridique interdit l'investissement aux fonds propres, les associations, ou en limite significativement la rémunération, les coopératives. Nous l'avons vu, ces organisations ont un choix plus limité en termes de modalités de financement. Soit elles se financent en titres participatifs ou associatifs, soit en dettes classiques. La même logique s'applique pour des sociétés commerciales. L'endettement a l'avantage de ne pas affecter la gouvernance de l'organisation, et peut donc être préférable si l'organisation génère suffisamment de cash flow et de manière suffisamment prévisible. En revanche, si l'organisation souhaite développer des innovations, changer d'échelle, avec un besoin d'investissement fort et un risque élevé, un financement assimilable aux fonds propres, donc en titres participatifs ou associatifs sera plus indiqué. Au delà d'adapter les instruments du financement à la nature financière du besoin de financement, la stratégie de financement de l'entrepreneur implique aussi de réfléchir à la valeur ajoutée des potentiels financeurs compte tenu du projet. Un investisseur à impact l'aidera à ancrer et développer la mission sociale ou environnementale de son entreprise. Un investisseur stratégique, c'est-à -dire une entreprise donnera accès à des opportunités de croissance spécifiques. Un financement participatif permettra de mobiliser les parties prenantes de l'entreprise, y compris ses clients, et donc participera à la constitution de la reconnaissance de marque. On en revient là au concept de smart money, c'est-à -dire que outre l'argent qu'ils apportent, il faut aussi choisir des investisseurs selon leur vision, leur compétence et leur réseau. Il s'agit donc, répétons-le, de bien comprendre les différentes typologies d'investisseurs et de décoder leurs thèses d'investissement, en particulier en comparant son projet au projet déjà en portefeuille pour pouvoir sélectionner les investisseurs les plus pertinents. [AUDIO_VIDE]