[MUSIQUE] En préambule, il convient de rappeler que le statut juridique est choisi en fonction des objectifs poursuivis par les porteurs de projets en termes de modes de financement et de gouvernance. Le statut juridique n'est qu'un moyen au service des objectifs stratégiques. Et ce n'est en aucun cas un point de départ, même si de nombreux entrepreneurs sociaux annoncent bien souvent avant toute analyse et travail préalable, vouloir créer une association, ou une SA au bien encore une SAS ou une SCIC. Nous reviendrons plus loin sur ce statut et sur ces sigles. En effet, c'est à partir de votre modèle économique que vous allez pouvoir définir le modèle juridique le plus adapté ainsi que la meilleure stratégie de levée de fonds à mener. Dans votre Business Model Canvas, en examinant votre structure de coûts et de revenus, vous pouvez déjà vous demander si les revenus identifiés vous permettront de couvrir vos coûts ou si vous allez devoir faire appel à des dons ou à des subventions et/ou des fonds publics locaux, nationaux ou internationaux, notamment pour la phase de démarrage du projet. Voici trois points à clarifier pour vous aider ensuite à choisir votre statut juridique et votre modèle de gouvernance. Un, avez-vous besoin de faire appel à des financements publics ou à des dons et subventions divers? Deux, l'entreprise a-t-elle besoin de lever des fonds conséquents pour lancer le projet? De mobiliser des investisseurs? Trois, quel pouvoir de décision l'équipe porteuse du projet souhaite-t-elle garder dans la direction du projet? Le caractère marchand ou non marchand du projet constitue un critère essentiel pour le choix du statut juridique. Alors, premier cas, votre projet est non marchand. Les projets d'entrepreneuriat social dont le modèle économique est principalement non marchand sont généralement développés sous la forme associative, ce qui leur permet ainsi de recevoir des dons et des subventions. Les modèles plus spécifiques de fondations reconnues d'utilité publique, de fondations d'entreprises ou de fondations sous égide, ainsi que de fonds de dotations sont aussi possibles. Mais nous ne les détaillerons pas dans ce module. Vous pourrez trouver plus de précisions dans les ressources complémentaires. Alors, l'association d'intérêt général. Comme toute structure relevant de l'économie sociale et solidaire, les associations doivent respecter certains principes fondamentaux. Un, l'adhésion est libre. On ne peut pas obliger quelqu'un à adhérer. Deux, le pouvoir est organisé démocratiquement selon des règles définies dans les statuts. Trois, la finalité est non lucrative. Les bénéfices éventuels doivent être entièrement réinvestis dans le projet de l'association. Attention à ce dernier point. Non-lucrativité ne signifie pas absence de profit. Cela signifie seulement que le surplus réalisé n'est pas réparti entre les membres qui constituent l'association. En effet, réaliser un surplus, c'est-à -dire générer au moins autant de revenus que les dépenses réalisées pour assurer l'activité est hautement recommandé. Souvenez-vous du dernier module dans lequel je vous disais que le modèle économique retenu devait permettre au produit de financer non seulement les charges, c'est-à -dire d'équilibrer les comptes, mais aussi d'assurer le développement de l'entreprise, condition indispensable de sa pérennité. Le statut associatif garantit une certaine souplesse et flexibilité dans la gestion du projet. Il peut aussi induire à un processus de décision plus long et plus lourd puisque deux instances contribuent aux décisions stratégiques. Ces deux instances, ce sont les élus du conseil d'administration qui représentent les membres adhérents et le directeur général et son équipe de direction qui représentent les salariés et qui sont forcément, aux termes de la loi, extérieurs au conseil d'administration. Les membres définissent librement les statuts de l'association afin de déterminer les règles d'adhésion, les modalités d'élection des dirigeants, la répartition des pouvoirs entre les instances de direction. A la création de la structure, il faudra en effet délimiter le pouvoir entre les dirigeants bénévoles, le bureau, président, trésorier, secrétaire, et les dirigeants salariés, s'ils existent. Notamment le délégué général ou le directeur. Ce dernier point signifie que le porteur du projet et de la vision de l'association, s'il veut être président de l'association, ne peut être salarié. Cela peut être un vrai élément de décision de vos statuts en fonction de la place que vous souhaitez prendre dans le projet. Dernier point non négligeable, le statut associatif peut ouvrir droit aux avantages fiscaux liés aux dons pour les oeuvres d'intérêt général, au mécénat, au bénéfice des donateurs ou mécènes dans le cadre de ce qui s'appelle le rescrit fiscal. Et pour cela, l'association doit être non seulement d'intérêt général mais aussi considérée comme étant à gestion désintéressée par l'administration fiscale suivant des critères fixés par la loi de 2002. Deuxième cas, votre projet est marchand, et le choix est alors beaucoup plus large. Pour toutes les structures ayant une activité marchande prépondérante, il est possible d'opter pour un statut associatif en respectant des règles précises en matière de TVA, mais également pour des statuts commerciaux plus classiques ou bien encore pour d'autres formes juridiques de l'économie sociale et solidaire. Ainsi, vous pouvez vous constituer en pas moins de huit statuts différents. D'abord, l'association loi 1901 comme pour un projet non marchand. L'association sera alors considérée comme lucrative et les activités seront soumises aux impôts commerciaux comme n'importe quelle société commerciale. Cette dimension fiscale a naturellement un impact sur vos projections financières. Ensuite, les SCIC, sociétés coopératives d'intérêt collectif. Vous opterez pour une SCIC si vous souhaitez associer à votre gouvernance, a minima vos salariés, vos bénéficiaires ou clients et des collectivités publiques ou des entreprises qui seront vos parties prenantes. Nous reviendrons dans le module 4 sur la notion de partie prenante. Vous opterez pour la SCIC si votre projet est ancré dans une logique de territoire, si elle vise au développement territorial. Si votre projet souhaite favoriser l'action de proximité et le maillage des acteurs d'un même bassin d'emploi. Vous opterez pour une SCIC si le principe, un homme une voix, et le caractère impartageable de tout ou partie des bénéfices vous conviennent et si vous ne misez pas sur le mécénat privé puisque les SCIC n'y sont pas éligibles. Autre forme, vous pourrez aussi choisir la SCOP. La principale particularité d'une SCOP est d'être dirigée par ses salariés. Alors, vous choisirez le statut SCOP si associer l'ensemble des salariés actuels et futurs à la gouvernance et aux orientations stratégiques de l'entreprise vous apparaît important pour son développement et sa durabilité. Si les obligations légales en matière d'affectation des résultats, tant dans les réserves impartageables que dans les accords de participation vous semblent adaptées à votre projet économique et social. Vous choisirez le modèle SCOP si les outils de financement qui pallient l'impossibilité de faire des plus-values lors de la revente des parts sociales dont le montant est figé par la loi vous paraît compensé par les modes de financement réservés aux SCOP, comme les prêts participatifs ou les apports en capital, en titres participatifs ou en obligations convertibles. Vous pourrez aussi bien sûr choisir les trois formes commerciales classiques, la SARL, société anonyme à responsabilité limitée, la SA, société anonyme, ou la SAS, société anonyme simplifiée, si les modèles proposés ci-dessus ne conviennent pas à votre projet économique et social. On peut noter que la SAS est une forme très prisée car elle impose des formalités administratives simplifiées et d'autre part, elle repose sur le pacte d'actionnaires. Ce pacte permet d'articuler de façon très précise, dans un texte fondateur et pérenne dans le temps, le projet économique et le projet social en posant des règles très strictes de fonctionnement et de partage des bénéfices. Il y a enfin les montages mixtes. L'expérience montre que nombre d'entrepreneurs sociaux décident d'adopter un statut transitoire prévoyant d'évoluer ensuite en fonction de l'évolution de leur modèle économique et de sa stabilisation, vers le statut le mieux adapté. On peut très bien imaginer la création de différentes structures avec des statuts juridiques différents, chacune ayant un objet bien précis, et distinct de celui des autres structures, et ce afin de réaliser pleinement le projet économique et le projet social de l'entreprise.