[MUSIQUE]
On a vu dans la séquence précédente que la ville est faite par des hommes et
pour des hommes essentiellement, et que l'espace public aussi.
Les hommes y sont mieux à leur place que les femmes
qui sont parfois agressées, harcelées.
On va revenir dans cette séquence sur les violences subies par les femmes dans
l'espace public.
Mais avant tout, il faut revenir sur une idée reçue : on a tous en tête l'idée que
l'espace public est plus dangereux pour les femmes que pour les hommes,
et la réalité est un peu différente comme vous le prouvent les statistiques
que vous avez, affichées à ma gauche,
qui portent sur les violences exercées dans l'espace public en France,
selon les déclarations des victimes, avec les biais que cela peut supposer.
Alors vous avez donc deux schémas : l'un qui nous parle des violences
physiques et l'autre qui nous parle des violences sexuelles.
Vous voyez pour les violences physiques que le nombre de violences
subies par les hommes et par les femmes est à peu près le même.
On a un million de victimes à peu près dans chaque cas.
Mais vous voyez que c'est réparti très différemment selon que
l'agresseur est une personne connue ou une personne inconnue.
Une personne inconnue, ça veut dire généralement dans l'espace public.
Et vous voyez donc ce chiffre : 53 % des agressions subies par les
hommes ont lieu dans l'espace public, de la part de quelqu'un qui est inconnu,
alors que c'est seulement le cas de 29 % des agressions subies par les femmes.
En réalité, pour ce qui est des violences subies par les femmes,
l'espace domestique est bien plus dangereux que l'espace public parce que
la plupart des violences subies par les femmes sont des violences exercées
par le conjoint, un membre de la famille ou quelqu'un de connu en tout cas.
Alors que dans la rue, au fond,
les femmes sont plus en sûreté et risquent moins les violences.
Pour ce qui est des violences sexuelles, il en va différemment.
Vous le voyez puisque la situation est très déséquilibrée entre les
hommes et les femmes,
les femmes subissant trois fois plus de violences sexuelles que les hommes.
Mais là encore, ce n'est pas à l'extérieur,
dans l'espace public, dans un parking sombre,
comme on l'imagine, que les femmes risquent ces violences sexuelles.
C'est de nouveau de la part d'un conjoint, d'un ex conjoint
ou d'un membre de la famille à l'intérieur de l'espace domestique.
Et donc cette idée que l'espace public est dangereux pour les femmes
est une idée qui est plutôt fausse.
Et on peut s'interroger sur les raisons pour lesquelles cette idée est tellement
répandue, répandue chez les hommes, répandue chez les femmes.
Alors il y a plusieurs réponses à cela.
Déjà parce que parler de violence, il faut s'entendre.
Qu'est-ce que c'est une violence?
Il y a des tas de violences qui ne sont pas répertoriées, qui sont des agressions
verbales, des agressions visuelles, des comportements qui mettent les femmes très
mal à l'aise sans que forcément ce soit compté comme une violence.
Il y a l'idée que le sentiment d'insécurité et l'insécurité
peuvent être deux choses également différentes.
On peut se poser des questions toutefois : à qui profite le crime?
Qu'est-ce qui fait que les femmes pensent que l'espace public est dangereux?
Quelles conséquences ça a sur le comportement des femmes?
Et quels intérêts, masculins peut-être, cela peut servir?
Ces questions, nous allons les poser à Marylène Lieber pour en savoir davantage.
Marylène Lieber est professeure à l'Institut d'Études genre de l'Université
de Genève, et c'est une spécialiste de la question des violences exercées contre les
femmes dans l'espace public.
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