[MUSIQUE] [MUSIQUE] Je m'appelle Estelle Guéret-Zing. Je travaille au département financements et conseils spécialisés du Crédit coopératif, et je dois dire que je suis particulièrement émue d'être là aujourd'hui, puisqu'il y a près de cinq ans, c'est avec ce MOOC précisément que j'ai décidé de réorienter ma carrière plutôt de finance classique, vers le financement de l'économie sociale et solidaire. Mon rôle au Crédit coopératif, c'est d'arranger et de placer des levées de fonds des structures de l'économie sociale et solidaire clientes du Crédit coopératif. Quand on dit arranger, placer, ça signifie à la fois préparer avec le client, le conseiller sur le montant, l'instrument de la levée, le choix des investisseurs, et puis épauler notre client tout au long de l'opération et tout au long de l'étude du dossier par les investisseurs. Nous pratiquons des levées de fonds pour tout type de structure de l'économie sociale et solidaire ; des entrepreneurs, mais pas que : des associations, et même des fondations ou des coopératives, tout type de structure de formes juridiques différentes. [MUSIQUE] Les levées de fonds répondent au besoin de renforcer le haut de bilan, ce qui permet d'investir, de financer de nouveaux projets, voire de financer, en partie, le cycle d'exploitation, et surtout de diversifier les ressources financières. Nous privilégions les levées sous format obligataire, privé, donc non coté et sans appel à l'épargne publique, et ces obligations sont placées auprès d'un nombre limité d'investisseurs que l'on dit qualifiés, ce sont des investisseurs professionnels. Parmi les structures de l'économie sociale et solidaire, les associations et les fondations sont un petit peu particulières, parce qu'elle n'ont pas d'action. Elles ont des fonds propres, qui comprennent à la fois des fonds associatifs avec ou sans droit de reprise, elles bénéficient d'apports en numéraire, d'excédents accumulés dans des réserves, mais elles n'ont pas d'action. Alors comment des investisseurs peuvent-ils renforcer ce haut de bilan? Il existe un instrument qui s'appelle le titre associatif, et qui a une nature de dette subordonnée, c'est-à -dire que c'est une dette, mais qui est remboursée après les autres, et qui est sans échéance fixe. De façon concrète, depuis 2014, le remboursement des titres associatifs ne peut intervenir qu'à partir de la septième année. Il est soit à l'initiative de l'association, soit déclenché après que la somme des excédents, pendant cette période de sept ans, excédents nets des déficits, dépasse le montant émis. On peut dire, en quelque sorte, qu'il s'agit d'une avance sur constitution de fonds propres. Le taux d'intérêt des titres associatifs est encadré : il est limité par la loi qui est complétée par des décrets. Elle ne peut dépasser, en mai 2021, 4,68 % l'an, par exemple. Lorsque le business plan n'offre pas suffisamment de visibilité aux investisseurs sur le remboursement probable du titre associatif par les excédents, on peut envisager une obligation associative. Là , il s'agit d'une dette certaine avec une échéance fixe, et la durée va dépendre de la rencontre de l'offre et de la demande. Nous avons parlé des associations, mais il y a d'autres structures qui offrent une particularité, ce sont les coopératives, les SCOP et les SCIC. Les SCOP, pour rappel, sont détenues majoritairement par les salariés, les SCIC permettent d'avoir une multitude de parties prenantes, et ont obligation de réinvestir plus de 50 % de leurs bénéfices. Donc comment renforcer le haut de bilan tout en préservant la structure de gouvernance particulière de ces structures? Là , on va utiliser d'autres instruments, le titre participatif par exemple, qui est également une nature de dette subordonnée, et qui va avoir une rémunération composée de deux parties : une partie fixe qui est en dessous du taux du marché, et qui est complétée d'une partie variable qui va dépendre de paramètres d'exploitation, par exemple l'EBE, et cette partie variable ne pourra pas dépasser les 40 % du montant émis. Pour les entrepreneurs qui adoptent des structures juridiques plus classiques, bien sûr le renforcement du haut de bilan passe par l'émission d'actions voire d'obligations convertibles en actions. Là , la rémunération et le type de remboursement sont libres, il s'agit d'une rencontre de l'offre et de la demande. [MUSIQUE] La rémunération d'un titre associatif, comme on l'a dit, comme celle d'une obligation associative, est capée, elle est limitée par la loi complétée de décrets. Cette rémunération du titre associatif va être limitée au taux moyen mensuel des obligations qui auront été émises pendant une période de trois mois précédant l'émission, on appelle ça le TMMO, et ce TMMO est complété d'une marge qui, pour le titre associatif, est au maximum de 4,5 % l'an. Donc aujourd'hui, en mai 2021, ce taux maximum ressort à 4,68 % l'an. Pour une obligation associative, là aussi il y a un cap, une limite, de façon à protéger les associations, et ce cap, il est à TMMO + 2,5 % l'an, ce qui ressort aujourd'hui à 2,68 % l'an. J'ai parlé du titre associatif et de l'obligation associative, et je vous ai dit que les associations et les fondations avaient une particularité : elles n'émettaient pas d'action. Il existe, de la même façon que le titre associatif, le titre fondatif, et de la même façon que l'obligation associative, l'obligation fondative, en quelque sorte, qui respectent les mêmes règles et les mêmes contraintes règlementaires. Une règle très importante, c'est que les investisseurs doivent tous bénéficier de conditions identiques pour une même tranche d'émission, c'est ce qu'on appelle une règle du pari passu. La deuxième chose, c'est que parmi les instruments cités, les titres associatifs, les titres participatifs, qui permettent de renforcer le haut de bilan, ne viennent pas modifier la structure de gouvernance ; ils ne donnent pas droit à des titres de capital ni à des droits de vote, contrairement aux actions ou bien aux obligations convertibles en actions si elles sont, de façon différée, converties. La troisième chose également, c'est que ces investisseurs sont réunis sous forme de ce qu'on appelle une masse obligataire, qui a une personnalité civile, mais c'est surtout que l'émetteur va organiser des réunions annuelles, au moins annuelles, pour les tenir informés de la bonne marche de son activité. [MUSIQUE] Les entrepreneurs et les structures de l'économie sociale et solidaire, dont la vocation première n'est pas de faire des bénéfices, auraient certainement du mal à servir une rémunération aux investisseurs classiques, en tous cas au niveau exigé par les investisseurs classiques. Donc nous privilégions les investisseurs solidaires, également des investisseurs dits à impact. La conséquence pour les émetteurs, c'est qu'il faut faire la démonstration d'un impact positif, sociétal et, ou, environnemental, avant toute étude du dossier par les investisseurs. Une autre condition préalable est d'avoir un agrément ESUS, entreprise solidaire d'utilité sociale. Les niveaux de rendement exigés par ces investisseurs solidaires sont moindres : ils s'étagent de 2 % l'an jusqu'à 5, 6 % l'an, voire un petit peu plus en fonction de la durée de l'engagement, du risque et de l'instrument choisi. En tout état de cause, l'appel à des investisseurs solidaires implique la définition d'indicateurs d'impact et leur suivi sur un rythme au moins annuel, communiqué aux investisseurs solidaires. [MUSIQUE]