[MUSIQUE] [MUSIQUE] >> Salut Julia. >> Salut Martin. >> Ça va? >> Ça va bien, et toi? >> Julia, tu es auxiliaire de recherche et d'enseignement chez nous. On a fait beaucoup de formations ensemble. Tu t'intéresses à la psychologie clinique et à la psychothérapie, et tu fais des formations aussi. >> Oui, c'est ça, exactement. Je m'applique à des formations postgrades pour être amenée à faire de la psychothérapie. >> Et puis, on a un petit peu bossé sur la mentalisation. >> Oui, c'est ça. >> On a fait plusieurs vidéos ensemble. Dans cette séquence, tu vas nous aider par ton jeu de patiente simulée. Et puis, ce que j'aimerais bien qu'on fasse c'est qu'on regarde des séquences et ensuite qu'on en discute ensemble. >> Ça marche. >> Le point qu'on va travailler dans cette séquence-ci ça va être la posture de non savoir. C'est tout ce qui est curiosité au sujet des états mentaux, comment la personne se représente elle-même. Il y a la première vidéo où je joue un thérapeute où la posture de non savoir n'est pas complètement installée. On va s'arrêter à ce moment-là , on va discuter un peu. Ensuite, on va voir une deuxième vidéo où j'ai tenté d'être un petit peu plus dans ma posture de non savoir, d'accord? >> Très bien. >> Ok, alors, commençons. Qu'est-ce qui s'est passé? >> Mon patron veut déjà que je pose mes vacances pour le mois prochain, parce que les [INAUDIBLE] commencé, et il a besoin de s'organiser. Mais moi, ce n'est pas possible [INAUDIBLE] du COVID. Et même dans ma façon de procéder et d'être, je n'arrive pas à me projeter aussi loin, à m'organiser. Je ne sais déjà pas ce que je vais faire la semaine prochaine, donc m'organiser un mois à l' avance, c'est compliqué, ce n'est pas possible. Et j'ai voulu faire comprendre ça à ce monsieur, et j'ai l'impression que ça n'a pas été très bien reçu. Je n'ai pas envie de collaborer avec des personnes avec qui je ne sais pas discuter. >> Mais vous ne croyez pas que lui, il a besoin de planifier aussi? >> Dans une certaine mesure, oui, mais un mois à l'avance, ça me semble un peu, je ne sais pas. >> C'est beaucoup? C'est peu? >> Pour moi, un mois, c'est super longtemps. >> Julia, dans cette première séquence, j'ai envie de te demander quel était ton expérience dans le jeu de rôle. En particulier, est-ce que tu as l'impression que tu parlais à quelqu'un qui avait une posture de non savoir ou qui savait déjà ? >> J'avais plutôt l'impression d'avoir un professeur en face de moi qui sait déjà ce qu'il y a dans la tête de mon patron. >> De l'employeur. >> De l'employeur. Et du coup, j'ai presque l'impression qu'il prend parti pour lui, qu'il se fait un peu l'avocat du diable >> Carrément. >> pour m'amener à comprendre ce que mon patron a essayé de me dire. >> Ok, donc tu as l'impression d'être en train de discuter avec quelqu'un qui veut te faire comprendre quelque chose? >> Oui, c'est ça. >> Et ça crée quel type d'émotion, ça? >> Au début, j'étais un peu interloquée, puis un peu surprise, et ça m'a un peu irritée. Je n'ai pas eu l'impression de me sentir vraiment écoutée par rapport à mon vécu, mon ressenti et mon point de vue, surtout. >> Du coup, nous, dans notre modèle de la mentalisation, ça veut dire que là , je ne suis pas super bien parti, parce que mon processus, il ne va pas chercher à accompagner la personne, mais plutôt lui faire comprendre quelque chose. >> Oui, complètement. >> On va voir une deuxième vidéo où je vais essayer de m'y prendre un peu différemment avec la posture de non savoir, d'accord? >> Oui. >> Ok. >> J'ai pas mal de conflits sur mon lieu de travail. La goutte d'eau qui fait un peu déborder le vase, ça s'est passé hier. Mon patron exige de moi que je lui donne mes vacances pour le mois prochain, donc dans un mois. Et j'ai essayé de lui faire comprendre que pour moi, ce n'était pas possible de faire ça parce que ce n'est pas dans ma personnalité de me projeter aussi loin. >> Un mois à l'avance. >> C'est ça, exactement. >> Comment il a réagi? >> Pas très bien. Il a essayé de me faire comprendre que ce n'était pas spécifiquement à moi qu'il demandait ça, mais qu'il demandait ça à l'ensemble du personnel. >> Qu'est-ce qu'il a essayé de vous faire comprendre, selon vous, en disant ça? >> Je pense qu'il a essayé de me faire comprendre que ce n'était pas destiné spécifiquement à moi, mais je n'arrive pas à le croire. >> Vous ne le croyez pas? >> Non. J'ai vraiment de la peine à >> Qu'est-ce que vous croyez? >> J'ai l'impression qu'il ne m'apprécie pas beaucoup. >> Bon? >> Oui. >> Et que ça se manifeste un peu dans cette excuse qu'il vous présente? C'est ça? C'est comme ça pour vous? >> Un petit peu, oui. Quotidiennement, je ne le trouve pas très avenant ou je ne dirais pas amical, on n'a pas à être amis, j'en ai bien conscience, mais un minimum. Du coup, je ne me sens pas du tout bien. >> Depuis un moment déjà , vous ne vous sentez pas bien? >> Oui. Je dirais que ça fait deux, trois semaines. >> Deux, trois semaines? >> Hmm. >> Julia, ça, c'était la deuxième vidéo. J'ai essayé de m'y prendre un petit peu différemment. Est-ce que pour toi, ça a fait une différence? Tu avais l'impression d'être avec quelqu'un qui voulait te faire comprendre quelque chose, ou c'était comment? >> Plus du tout comme avant. Là , je me sens vraiment beaucoup plus écoutée et comprise. >> Qu'est-ce qui aide? >> J'ai l'impression qu'il n'y a plus cet aspect de vouloir me faire comprendre ce qu'il y a dans la tête du patron, et qu'on est beaucoup plus centrés sur mon point de vue, sur ce que moi je peux ressentir. >> Et ça, pour toi, c'est tolérable? Ça va, qu'on te pose des questions de cette manière-là ? >> Là , je n'ai pas du tout ressenti d'irritation, chose qui était le cas dans la première vidéo. Là , je me sens vraiment beaucoup plus écoutée et comprise. >> Est-ce que mon intention de vouloir comprendre tes états mentaux, ça paraissait pour toi, c'était clair? Est-ce que ces intentions-là de ma part étaient plus claires? >> Oui, j'ai l'impression. >> Ça, c'est important pour moi en tant que thérapeute. Je vais vouloir, bien sûr, essayer de mettre ça en mots, mais aussi aller vérifier avec la personne si ce que je mets en mots, ça correspond à son expérience. On va un petit peu récapituler ensemble les différents points de notre posture de non savoir, qui commence, bien sûr, par tout ce qui est intérêt envers les états mentaux. Cette curiosité-là que j'essaie de mettre dans le jeu de rôle, dans mon contact avec Julia, cette curiosité est très importante pour essayer de générer ce sentiment d'être écoutée, d'être comprise éventuellement. Je vais beaucoup plus m'intéresser au processus de notre conversation, de notre dialogue qu'au contenu lui-même. Ça ne veut pas dire que je vais mettre le contenu à côté, mais je vais être plus attentif au processus. Je vais être plus dans la nuance. Je vais essayer de voir comment ça s'est passé pour Julia, et non pas pourquoi elle pense que ça s'est passé comme ça. J'essaie vraiment de faire décrire et je vais essayer d'éviter ma tendance personnelle à vouloir tout expliquer, tout comprendre. Après ça, je vais aller vérifier auprès de Julia, voir si ma manière d'interpréter les choses, de comprendre s'accorde avec sa manière de voir les choses. Et j'essaie en tous temps, ce qui est difficile, mais j'essaie de réactiver ça constamment, cette aptitude pour moi à rester ouvert à la surprise, ouvert aux perspectives, peut-être surprenantes, de la manière dont Julia voit les choses, parce que ça va m'aider à ajuster ensuite mes représentations par rapport à comment elle vit les choses. Je vais essayer d'éviter aussi de rentrer dans de la certitude au sujet de ce qu'elle a vécu, d'essayer de la convaincre, et d'utiliser les fameux verbes non mentalisants comme « il faut », « vous devriez », tout les mots comme « toujours », « jamais », « c'est sûr », et encore une fois essayer d'éviter de tout expliquer immédiatement. D'abord, notre but c'est d'entrer en contact avec la personne au travers de cette posture de non savoir. [MUSIQUE] [MUSIQUE]