[MUSIQUE] [MUSIQUE] Les trois premières leçons nous ont amenés au travers du parcours des 80 premières années qui ont mené à la reconnaissance et à l'opérationnalisation, c'est-à-dire la caractérisation du trouble de l'autisme infantil avec le DSM-III dans les années 1980. Maintenant, pour la quatrième leçon, nous allons nous centrer sur les développements contemporains, notamment des années 1990 mais aussi des années 2000, 2010 pour voir comment notre compréhension et la manière dont on caractérise l'autisme a évolué. Comme vous pourrez le voir dans cette leçon, cette évolution est constante. Elle est informée par la recherche. Elle est informée par les travaux sur les prises en charge. Elle est informée par, aussi, les groupes d'intérêts qui souhaitent faire reconnaître leur existence, leurs particularités et la manière dont ils vivent pour qu'ils soient le mieux reconnus possible. Et donc, le diagnostic n'est pas historiquement un objet fixe mais bien un objet dynamique auquel il est utile de s'intéresser pour y percevoir les spécificités à chacune des versions de la conception de l'autisme, et ceci peut-être vous aidera à comprendre pourquoi chez vous ou dans votre ville, dans votre système scolaire, de prise en charge ou de santé, vous êtes souvent confrontés à différentes perspectives sur l'autisme, différentes manières de le définir. Donc cette perspective historique est là pour vous aider à faire le tri et à mieux comprendre. Au travers de toutes les conceptions diagnostiques de l'autisme, vous reconnaîtrez trois domaines de particularités, de symptômes qui reviennent constamment : le domaine de la communication, le domaine de l'interaction sociale et le domaine des intérêts restreints et des mouvements répétitifs. Selon la version diagnostique sur laquelle vous vous penchez, ces domaines-là peuvent être définis de manière différente, avec des différences relativement subtiles. Dans le passage entre les années 1990 et la version actuelle qui date de 2013 du diagnostic des troubles du spectre de l'autisme, on peut se pencher d'abord sur deux différences fondamentales. La première est que dans la version de 2013 de ce qu'on appelle le DSM-5, une nouvelle catégorie apparaît, la catégorie des troubles du neurodéveloppement. Les troubles du neurodéveloppement, on en parlait déjà, bien sûr, mais ils ne constituaient pas une catégorie diagnostique à part entière. Et donc ça a pris presque 100 ans, depuis Bleuler jusqu'à aujourd'hui, pour focaliser sur les troubles du neurodéveloppement. La deuxième spécificité du système diagnostique de 2013, le DSM-5, c'est l'évaluation de la sévérité du trouble, et ça, c'est très important puisque la sévérité est désormais caractérisée selon les besoins que le trouble engendre. Prenons un enfant qui aurait un trouble du spectre de l'autisme mais qui est intégré à l'école et où tout se passe relativement bien. On dirait qu'il y a une sévérité légère en comparaison à une sévérité moyenne ou alors une sévérité beaucoup plus importante où, là, on peut aussi avoir des enfants qui ne décrochent pas le langage et qui ont besoin d'une assistance beaucoup plus importante au niveau de leur fonctionnement quotidien. Donc, ces différences entre troubles neurodéveloppementaux et sévérité vont caractériser la pratique diagnostique contemporaine. Un troisième élément qui est d'intérêt pour nous, c'est qu'il y a dans la triade des symptômes de l'autisme deux groupes de symptômes, communication et interactions sociales, qui ne vont désormais plus faire qu'un groupe de symptômes. Communication et interactions sociales sont désormais réunies. Penchons-nous maintenant sur les différences entre la définition de l'autisme en 1994 et la définition actuelle qui date de 2013. On a un certain nombre de domaines de symptômes entre ce qu'on appelle le DSM version IV et le DSM version 5, qui ont en quelque sorte bougé de place ou alors qui sont devenus pertinents ou qui ont perdu leur pertinence, et ce sur la base des travaux qui ont été menés dans les années 1990 et 2000. La première particularité qui est fort intéressante est celle de la nécessité ou du symptôme autour du trouble du langage. Vous vous rappelez notamment les travaux de Lorna Wing dans les années 1970 et 1980, sur la communication, qui ont aidé à établir l'autisme comme un diagnostic à part entière. Eh bien actuellement les troubles du langage ne sont plus des symptômes diagnostiques de l'autisme. Ils ont été retirés des symptômes cardinaux. Néanmoins, une évaluation du langage est absolument pertinente dans la majorité des cas. Le deuxième symptôme à faire sa sortie des symptômes cardinaux est celui du manque de recherche spontanée et de partage des intérêts, qui encore une fois sont des manifestations qui sont intéressantes à évaluer mais qui ne font désormais plus partie des symptômes dans la définition du trouble du spectre de l'autisme. En revanche, et ce suivant un certain nombre de travaux aussi assez récents sur les altérations sensorielles, tout le domaine de la sensorialité revêt une importance accrue et il y a un certain nombre de découvertes, que vous allez aussi vous-mêmes découvrir au travers de ce MOOC sur l'autisme, autour du fonctionnement sensoriel et de certaines altérations typiques dans le développement. Enfin, le DSM-5 suggère, et pour tenter de diminuer le surdiagnostic sur la base de la communication verbale et non verbale, le DSM-5 propose une série de troubles où les seuls symptômes présents sont le manque de communication non verbale, le manque de développement et de maintien des relations sociales, et le manque de réciprocité socioémotionnelle. Si l'enfant n'a que ces difficultés, on ne va pas parler de trouble du spectre de l'autisme, on va plutôt parler de trouble de la communication sociale, et ce pour éviter du mieux que l'on peut de surdiagnostiquer l'autisme. Dans cette séquence, nous sommes partis du plus général au plus particulier. Nous avons d'abord vu les grands changements au niveau diagnostique de l'autisme, et ensuite de manière peut-être un peu plus spécifique les changements qui ont été opérés entre les années 1990, les années 2000 et aujourd'hui, 2010 et plus. Qu'est-ce que nous réserve l'avenir? Eh bien nous ne le savons pas sauf peut-être dire qu'il y aura certainement des changements puisque sur une période aussi courte que 30 ans de diagnostic de l'autisme, nous avons déjà opéré un certain nombre de changements, des changements qui ont un impact au niveau de la prise en charge, de la manière aussi, bien sûr, dont on définit l'autisme, de la manière dont on pense à l'autisme. Avec l'introduction du spectre, il est espéré que l'on puisse mieux caractériser les différences inter-individus, et peut-être aussi ouvrir à une conception qui permet l'idée de la neurodiversité, des particularités de chacun comme étant parfois des forces parfois des obstacles au développement. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]