[MUSIQUE] [MUSIQUE] Dans le domaine du diagnostic du TSA, il y a des thérapeutes qui pensent qu'il ne faut pas annoncer trop tôt le diagnostic. En effet, il y aurait un risque d'erreur et certains ne veulent pas prendre de risques de blesser une famille ou d'amener une famille à s'inquiéter excessivement. Il existe la crainte de poser un diagnostic qui pourrait enfermer le patient et sa famille dans une forme de déterminisme, conduire à considérer le point d'arrivée le plus pessimiste à l'âge adulte, ce qui pourrait pousser le patient et sa famille dans une forme de régression, de renonciation. Cette conviction a conduit certains cliniciens à une prudence, une réserve à poser le diagnostic trop tôt. Pour d'autres professionnels de la santé, c'est la position opposée qui prévaut. En effet, tant qu'une personne ou sa famille ne comprend pas pourquoi la personne est en difficulté, elle va rester dans une forme de quête et pourra peiner à se concentrer sur la prise en charge avec la conviction nécessaire à un traitement qui est souvent très lourd ou qui demande beaucoup d'efforts. Lorsque la famille comprend qu'une partie des informations lui ont été cachées, il y a une rupture de confiance, car le patient a suivi un traitement qu'il estime parfois comme n'étant pas le meilleur traitement pour la prise en charge, mais qu'il a suivi alors qu'il n'avait pas les informations nécessaires pour en évaluer la pertinence. Dans le domaine de l'autisme, ce qui a vraiment permis à la communauté de sortir de cette polémique, c'est d'une part, le développement de traitements spécifiques pour la prise en charge de l'autisme, d'autre part, la recherche qui a montré que ce sont les prises en charge les plus précoces qui vont donner le meilleur résultat. À partir de là , il n'était plus possible de ne pas dire clairement au patient et à sa famille quels traitements spécifiques suivre et surtout le plus précocement possible. Comme vous allez le voir dans des vidéos illustratives, c'est la manière dont le diagnostic est annoncé à la famille qui va influencer son investissement dans le traitement. >> Comme vous venez de l'entendre, il ne faut pas hésiter à poser le diagnostic pour pouvoir établir un plan de traitement le plus rapidement que possible. Mais dans ce processus diagnostique, le lien établi entre le thérapeute et la famille ou le patient est vraiment important. La recherche démontre qu'il y a deux composantes indispensables pour une séance de retour de bilan réussie. Premièrement, c'est important que la famille ait le sentiment que le clinicien se sent vraiment concerné. La famille devrait sentir que le clinicien se soucie vraiment de comprendre la situation avec leur enfant. Deuxièmement, c'est important que la famille ait le sentiment que le clinicien est compétent, ouvert et honnête. Comme on va le voir dans les prochaines vidéos, un bon lien dès le début du bilan est primordial. Les différentes étapes de l'annonce diagnostique seront détaillées dans la suite de ce module, mais avant de commencer, nous souhaitons vous montrer une vidéo dans laquelle des parents apprennent le diagnostic de leur enfant et par des enjeux d'un tel diagnostic, avec beaucoup de clairvoyance. Vous verrez également avec quelle délicatesse le thérapeute mène cet entretien. >> Ce qui est plus présent, c'est ce qu'on appelle les symptômes négatifs, c'est-à -dire les choses qui ont tendance à ne pas être là , qu'on trouverait chez une personne avec un développement de tout le monde. Exemple, dans la diminution de la modulation affective, où elle ne l'exprime pas très fortement, en tout cas dans la relation avec une personne en général. C'était le cas avec les examinateurs [INAUDIBLE]. Je n'ai pas dit que c'est comme ça avec tout le monde. Elle a plutôt tendance à être assez apathique. Elle a ces difficultés d'initiation comme vous avez vu. Elle n'est pas très spontanée, pas au sens qu'elle ne dit pas ce qu'elle pense, au sens qu'elle n'initie pas, il n'y a pas de trucs qui sortent. Donc, il y a une diminution du flux verbal, ce qui a fait qu'elle a ce côté [INAUDIBLE] tout va dans le même sens, dans une espèce de sens de retrait. >> C'est aussi parce qu'on ne l'écoute pas. >> Oui, mais moi, j'étais tout à elle. >> Non, mais quand des fois elle se dit, mais les gens ne m'écoutent pas. >> Non, ce n'est pas que ça, j'ai l'impression qu'elle a pris, elle n'a pas forcément le vocabulaire pour dire ce qu'elle voudrait dire. Elle n'a pas forcément le niveau pour dire pour dire ce qu'elle ressent en fait, simplement. >> C'est peut-être pour ça qu'elle n'ose pas parler. >> Ce n'est pas qu'elle n'ose pas, c'est qu'elle n'a grand-chose à dire, en fait, je crois. >> C'est ça. >> C'est que si tu enlèves une grande partie de ta pensée, il ne reste plus grand-chose à dire, tout simplement. >> C'est ça. >> Ce n'est pas une frustration de ne pas parler? >> Parce que je vois que quand on lui demande quelque chose, c'est compliqué pour elle, et j'ai essayé, je l'avais dit à votre collaboratrice, les papiers qu'elle devait remplir, on a fait une page ou deux avec elle, après j'ai rempli à sa place, parce qu'elle ne comprenait pas. Ce sont des choses, voilà . Elle ne comprend pas la question, donc elle ne peut pas répondre, elle ne peut pas expliquer, elle ne ressentira pas, enfin, il y a toute cette palette qui manque en fait. >> Avec la difficulté d'abstraction. >> Les films comiques, elle n'aime pas. Elle ne comprend pas. >> Le double sens d'ailleurs. Elle m'a parlé de ce qu'elle aimait regarder. [INAUDIBLE] >> Elle était morte de rire pour Charlie Chaplin, Le dictateur. Elle a eu des hurlements de rire, mais je lui ai montré Le grand blond avec une chaussure noire, j'ai cru qu'elle allait voir le côté burlesque mais non. Charlie Chaplin, premier degré. >> Non mais, le second degré, quelquefois elle commence à comprendre, je veux dire, mais... >> Elle n'y arrive pas. >> Donc, par exemple, ce qu'elle m'a dit qu'elle aimait beaucoup, c'était ces dessins animés avec les [INAUDIBLE] lapins, des couleurs, qu'est-ce qu'elle aimait encore? Elle aime beaucoup voir en fait ce qu'elle fait sur l'ordi et le truc, le téléphone, c'est de regarder des grands galops et [INAUDIBLE] des chevaux. Je pense qu'elle a dû voir chaque épisode [DIAPHONIE] >> [DIAPHONIE] [TOUX] en dessin animé, en film, à toutes les sauces, en jeu probablement. >> Alors, la difficulté avec ce fonctionnement, c'est qu'il pousse au retrait. >> Elle est passive. >> S'il la pousse à la passivité, la pousse au retrait, ça fait partie de ces symptômes négatifs et il faut vraiment lutter contre ça. >> Excusez-moi, par ailleurs, elle est aussi très dynamique aussi comme je le disais tout à l'heure, c'est elle qui s'est quasiment organisée son camp de ski, c'est elle qui a insisté, parce que moi, je ne voulais pas, elle voulait faire de la gym dans le village. Je ne voulais pas, j'ai dit, tu ne vas jamais y arriver. Elle a insisté pendant des mois. Elle fait la gym au village avec des filles de son âge. >> Super, c'est initiative [DIAPHONIE] super. >> L'équitation, elle le fait toute seule, mais le but était qu'elle le fasse avec d'autres. Malheureusement, il n'y en a pas d'autres dans ce niveau, mais c'est elle qui voulait être avec les autres. Elle est beaucoup sur l'ordi, au téléphone, etc., quand elle est seule, parce qu'elle a besoin de moments où elle se relâche, mais dès qu'elle peut, elle essaie de voir du monde. >> Limitez quand même ça. >> Alors, on limite si on peut, mais on ne peut pas toujours, voilà , quand elle a une copine qui est là , c'est parfait, parce qu'elle ne va regarder son téléphone quasiment, ou en tout cas là on arrive, mais je n'ai pas d'autre chose à proposer. Mais c'est vrai qu'elle peut passer plusieurs jours avec sa copine à dormir chez l'une chez l'autre, à s'amuser toute la journée. Elle ne se préparait pas le matin, je devais l'habiller. À un moment donné, j'ai dit là , je ne peux plus Inès, alors on ne va pas à l'école. Ce n'est pas grave. Et puis finalement, elle s'est habillée, donc ça avance, mais c'est quand même lourd. Ça demande beaucoup d'énergie pour pas grand-chose, tout. >> [INAUDIBLE] >> C'est usant. >> Et encore, tu as un fils. [INAUDIBLE] >> [INAUDIBLE] On voit toujours ce qu'on aime voir. Par ailleurs, elle est aussi chou, elle est au contact. >> Bien sûr. >> Elle parle, elle a peu de choses à raconter. >> Non mais, elle est par ailleurs super. C'est vrai qu'elle est toujours contente. Finalement, elle est quand même contente. Elle a des relations très, très simples. >> [DIAPHONIE] >> Elle se sent sécure. >> Oui, elle a des relations très simples avec les gens. >> Elle n'a pas vraiment de problèmes [INAUDIBLE] >> Non, c'est très sain, sa manière d'être, elle est sûrement plus saine que la mienne, je veux dire. Elle ne se pose pas trop de questions. Elle est contente. Quand quelqu'un meurt, elle lui dit, la première chose quand on lui dit que quelqu'un est mort, c'est quel âge il avait? Et plus c'est jeune, plus elle dira, c'est dommage, il n'a pas beaucoup vécu. C'est son premier réflexe avant d'être triste ou d'être inquiète pour les autres. C'est d'abord est-ce que cette personne a beaucoup vécu? Donc, je trouve que c'est très sain comme réflexion finalement. Non, on doit apprendre d'elle d'une certaine manière, mais voilà . C'est difficile comme parent. >> La partie qui est difficile, c'est quoi? >> Le deuil d'un enfant normal. >> Oui. Les deuils. >> Les deuils des deux. >> Non, ce n'est pas ça. C'est une >> Toi, tu as encore eu le deuil [INCOMPRÉHENSIBLE]. >> Non, c'est une succession de deuils, un enfant comme ça. C'est le deuil de l'école, le deuil de ceci, le deuil de >> l'autonomie. >> De tous les passages, en fait. Donc on n'arrête pas de... Et c'est vrai que c'est difficile à grandir dans le sens où ça devient bizarre. Je vois Manon, je dois aller l'habiller. Vous avez vu physiquement comment elle est. Ça devient bizarre. >> C'est presque une femme. >> Oui. Ça fait bizarre de devoir [DIAPHONIE] l'habiller dans le magasin. [RIRE] >> [DIAPHONIE] un enfant. >> D'aller essayer un soutien-gorge et puis en même temps de devoir lui changer la culotte. Vous voyez, ce genre de truc qui se font, c'est super space. C'est d'avoir une fille comme ça qui a l'air tout à fait normale et puis de lui tenir la main dans la rue avec une peluche. On est plus confrontés à des situations entre guillemets anormales. Manon a ses règles mais elle est capable d'oublier de remettre une serviette. [RIRE] Ça ne la gêne pas plus que ça. Des bébés, on accepte beaucoup plus de choses mais [BRUIT] c'est vrai que c'est. Elle s'est achetée des boucles d'oreilles, des créoles l'autre jour. Elle arrivait à peine à donner les sous. [RIRE] Voilà , c'est [RIRE] des situations un peu paradoxales. >> Avant, vous avez dit que c'est une succession de deuils. Je me suis demandé en vous écoutant notamment ce matin, je me suis dit, mais comment est-ce qu'on pourrait réfléchir, se caler dans quelque chose de plus constant dans la vision que vous pouvez avoir de votre enfant, où vous évitiez de faire ces montagnes russes et d'éviter des bascules où vous allez de moments où tout est possible, beaucoup de choses sont possibles, tout n'est pas possible, à des moments où on a l'impression que c'est vraiment un crépuscule. >> La plupart du temps, quand on est dans la vie courante, on oublie un peu. >> Et là , vous êtes calé [DIAPHONIE] >> On se cale un petit peu à ce qui est, voilà , elle va à l'école, machin, tout va bien, sa copine, on est habitués à ça. Et tout à coup, il y a un élément qui fait que [BRUIT] on revient un peu dans la réalité, finalement. Il y a toujours deux, trois choses. >> Tu es en France en train de choisir un soutien-gorge pour elle et puis tu as un bébé à côté. [DIAPHONIE] avec la vendeuse. >> Non, mais ça, ça va parce que c'est quand je fais du shopping, donc je vois aussi des progrès mais c'est par moments où tout à coup, quand on sort des habitudes, on sort du quotidien et puis on voit la différence. Ou tout à coup, ça peut être un reportage à la télé sur des adolescents de 13 ans qui discutent entre eux, puis [BRUIT] mon Dieu! Parce que [RIRE] ça fait un choc parce qu'on a tendance un peu à oublier. Ça vient toujours de l'extérieur en fait, tout ça, finalement. Oui, au quotidien comme ça, si on reste dans nos petites habitudes, on oublie un peu. Après, c'est un travail à faire aussi sur nous dans le sens où je dois me dire, okay, elle n'est pas comme ça mais qu'est-ce que j'ai à la place? Puis j'essaie mais c'est un travail à la limite. Pourquoi est-ce que ça irait mieux? Il n'y a rien qui fait que ça pourrait aller mieux. Il n'y a pas de... Je le prends comme un aveu de naïveté de penser que ça va aller mieux. [BRUIT] >> La question que je vous pose c'est pourquoi vous... Je vais le formuler autrement. Ça vous amène quand même à ne plus voir ce qui va bien. [INCOMPRÉHENSIBLE] attentive à ça. Comme je vous ai dit avant, >> Si, parce que là , je vois quand même ce qui va bien. >> OK, quand même. >> Oui. Il y a des trucs où je suis hallucinée. Je vous ai dit qu'elle a organisé son camp de ski. Moi, c'est un truc qui m'hallucine. >> C'est un rayon de soleil. [DIAPHONIE] >> Une fois, elle me dit j'aime Louane. J'aime bien, j'aimerais aller à un concert. Bon ben regarde. Puis deux heures après, elle me dit, il y a un concert le 15 avril maman, à Genève. >> Et vous êtes allés? >> [DIAPHONIE] [RIRES] >> Oui. Je n'ai pas le choix. Elle m'a même appelée quand j'étais en week-end. Elle m'a appelée, maman, >> C'est où? À l'Arena? >> Oui. [RIRE] Elle me dit, mais maman, tu sais, il y a des billets. C'est bon, il y a des billets debout. Je dis non, il n'y en avait plus. Oui, mais maman, il y en a encore deux à 170 francs. J'ai assez d'argent. Mais non, on ne va pas payer 320 pour Louane. [RIRE] Et puis on y va parce qu'il n'y avait pas le choix. Donc elle a des trucs comme ça où maintenant, elle veut aller dans l'école normale. Je ne veux pas, mais d'une manière ou d'une autre, elle va nous amener là -bas. C'est évident qu'elle va trouver une solution pour aller avec les autres enfants. Donc il y a des trucs comme ça où elle est hallucinante. [MUSIQUE] [MUSIQUE] [MUSIQUE]